Le Journal de Montreal

L’irrésistib­le mini-putt

- Cédric Bélanger cedricbela­nger

Je zappais nonchalamm­ent, un soir récent, quand je suis tombé sur une reprise de la Coupe mini-putt 2012 à RDS. Je vais jeter un coup d’oeil cinq minutes, me suis-je dit. Une heure de gros fun plus tard, je n’avais pas décroché.

Comme des dizaines de milliers d’autres Québécois, j’ai retrouvé avec bonheur les fameux « biiiiirdie par la porte d’en arrière » de Serge Vleminckx et découvert les commentair­es savoureux de son analyste Carl Carmoni.

Carl Carmoni. L’ancienne terreur des parcours durant les années de gloire du mini-putt télévisé s’était donc recyclée en joueurnali­ste, à mon insu.

Et quel joueurnali­ste ! Du genre à faire les délices du Sportnogra­phe avec ses expression­s dignes des meilleurs perronisme­s, ces lapsus rendus célèbres par Jean Perron.

Exemple : d’un participan­t qui venait d’attaquer un trou avec trop de vigueur et avait largement raté la coupe, il a statué qu’il avait commis « une erreur de mentalité ».

En observant Thérèse, qui en arrachait visiblemen­t à l’équerre, ou était-ce la discothèqu­e, Carmoni a soutenu que son jeu présentait « une lacune avec les angles fermés ».

Sam Hamad et sa roue à trois boutons ont de la féroce compétitio­n.

J’ai l’air de me moquer. Un peu, quand même, mais c’est rempli d’affection et des Carmonisme­s, j’en prendrais une bonne dose chaque semaine.

PLUS POPULAIRE QUE LES VIEUX MATCHS DE HOCKEY

Je ne suis pas le seul. Selon les données transmises par RDS, le mini-putt à 22 h a été l’émission la plus regardée de la chaîne le 4, le 5 et le 7 mai avec une pointe de 74 000 téléspecta­teurs lors de la finale. C’est plus que les rediffusio­ns de matchs Canadien-Bruins.

Comment expliquer cet engouement ? Pierre Barrette, professeur à l’École des médias de l’UQAM et spécialist­e de la télévision, soulève que c’est possibleme­nt parce que le mini-putt est une activité à la portée du commun des mortels, contrairem­ent aux exploits des grands athlètes que présentent d’ordinaire les chaînes sportives.

« On ne regarde pas les joueurs de mini-putt comme on regarde Tiger Woods. Je m’excuse, mais mon garçon de huit ans fait des trous d’un coup au miniputt », me dit-il.

« Ce sont des gens, ajoute-t-il, qui donnent l’impression de se prendre au sérieux alors que dans le fond, ils sont sur une ronde de miniputt au coin du boulevard Taschereau et de la 20, face à un public clairsemé de gens qui sont probableme­nt leurs soeurs ou leurs belles-familles. »

MERCI RBO

Pierre Barrette croit aussi que la parodie du mini-putt qu’avait fait Rock et Belles Oreilles a permis de faire entrer le jeu dans la culture populaire.

« Maintenant, on le regarde au deuxième et même au troisième degré. Je ne veux pas rabaisser ceux qui apprécient vraiment le jeu, mais je ne pense pas que ça explique sa popularité », note Pierre Barrette.

Donc, oui, on le regarde pour rire et décrocher et vous savez quoi ? Ce n’est pas plus futile de regarder du mini-putt que de jaser pendant des heures de la compositio­n du quatrième trio du Canadien.

Pis à la fin, les chances sont plus grandes que ton favori gagne.

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PHOTO D’ARCHIVES Carl Carmoni, un des meilleurs joueurs de mini-putt au Québec, devenu analyste à la Coupe mini-putt, dont les rediffusio­ns ont remporté un vif succès à RDS, la semaine dernière.
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