Le Journal de Montreal

Caméras corporelle­s adoptées par les policiers de Kuujjuaq

Les agents n’y voient que des avantages depuis leur arrivée il y a cinq mois

- FRÉDÉRIQUE GIGUÈRE

Ramené au coeur de l’actualité après le meurtre de George Floyd aux États-Unis, le port de caméras corporelle­s par les policiers est déjà implanté dans le Nord-duQuébec, où des patrouille­urs ne s’en passeraien­t plus.

« Il n’y a pas un policier ici qui n’est pas content d’avoir ça sur lui », lance d’emblée le capitaine Maxime Mercier, qui oeuvre pour la police de Kativik depuis six ans.

Les premières caméras ont été distribuée­s aux patrouille­urs de Kuujjuaq, le plus gros village de leur territoire, en janvier. Bientôt, les agents qui travaillen­t dans les 13 autres villages nordiques seront aussi munis de caméras corporelle­s.

Historique­ment, la relation entre les autochtone­s et les policiers dans le GrandNord a toujours été tendue et difficile.

L’arrivée de ces caméras est accueillie positiveme­nt tant par les patrouille­urs qui la portent que par les habitants, selon le capitaine Mercier, car elles permettent d’emblée d’apaiser les tensions.

« C’est vraiment quelque chose qui est bon pour les deux côtés, explique-til. Autant ça peut aider un policier dans une éventuelle cause en cour, en déontologi­e ou avec le Bureau des enquêtes indépendan­tes, par exemple, autant ça met l’habitant en confiance de savoir que l’interventi­on du policier sera filmée et possibleme­nt vue par ses supérieurs. »

DEUX CÔTÉS DE LA MÉDAILLE

À titre d’exemple, une vidéo a été publiée récemment sur Facebook pour dénoncer une présumée arrestatio­n musclée. Celleci a été filmée partiellem­ent par le suspect.

Sur les images, on aperçoit l’individu se faire expulser d’un établissem­ent par les policiers. Le patrouille­ur lui demande d’éloigner la caméra de son visage, puis le maîtrise afin de le menotter et l’arrêter.

« À première vue, ça fait peur et ça semble brutal et rapide, mais l’interventi­on a duré 30 minutes et les images montrent la dernière minute. Heureuseme­nt, toute la scène a été filmée par la caméra du policier et les images ont été remises au procureur. »

Comme le projet pilote est encore récent, il est encore trop tôt pour tirer un constat de l’efficacité de ces vidéos sur les causes devant le tribunal.

ILLUSTRATI­ON DE LA VIOLENCE

Un patrouille­ur d’expérience qui porte une caméra depuis près de deux mois est d’avis que celle-ci sera particuliè­rement utile dans les cas de violence conjugale.

« Moi je vois ça comme un support visuel de mon témoignage, raconte l’agent Paul Nezan. Lors d’une interventi­on où une femme vient d’être violentée, par exemple, c’est difficile parfois de trouver les mots pour expliquer au juge à quel point la victime était sous le choc et traumatisé­e. C’est une chose de dire au juge que la femme était couverte de sang, mais c’en est une autre de le voir. »

Si les policiers de Kuujjuaq ont la chance de travailler principale­ment en équipe, c’est loin d’être le cas dans la majorité des autres villages, où les agents patrouille­nt seuls.

« Je vois ça un peu comme un partenaire silencieux, mais tellement important », ajoute le policier de 33 ans.

 ?? PHOTOS COURTOISIE, POLICE DE KATIVIK ?? L’agent Paul Nezan (à droite) porte une caméra corporelle depuis bientôt deux mois. Il est d’avis qu’elle améliore grandement la sécurité de tous. En mortaise, l’appareil fixé à la veste pare-balle des patrouille­urs doit être activé manuelleme­nt par le policier.
PHOTOS COURTOISIE, POLICE DE KATIVIK L’agent Paul Nezan (à droite) porte une caméra corporelle depuis bientôt deux mois. Il est d’avis qu’elle améliore grandement la sécurité de tous. En mortaise, l’appareil fixé à la veste pare-balle des patrouille­urs doit être activé manuelleme­nt par le policier.

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