Le Journal de Montreal

Lutter contre l’itinérance en offrant des logis

Le PDG sortant de la Mission Old Brewery croit que c’est préférable aux refuges

- NORA T. LAMONTAGNE

À l’aube de sa retraite, le PDG de la Mission Old Brewery remet en question le financemen­t des organismes comme le sien et constate que certains encouragen­t l’itinérance chronique à Montréal.

Après 13 ans à la Mission, qui vient en aide aux hommes et aux femmes sansabri de la métropole, Matthew Pearce est d’avis que la lutte contre l’itinérance ne passe pas nécessaire­ment par des budgets plus importants, même si plusieurs estiment que le milieu est chroniquem­ent sous-financé.

« Le problème n’est pas un manque d’argent, c’est la distributi­on, croit-il. Il y a de multiples organisati­ons qui font de très bonnes choses, avec des gens dévoués. Le problème, c’est qu’il y en a trop. Ça prend des grands organismes qui alignent leurs stratégies. »

Malgré des années d’expérience dans le milieu social, M. Pearce s’étonne également qu’on ne connaisse pas le montant exact d’argent rendu disponible à la cause de l’itinérance par les trois paliers de gouverneme­nt et les nombreux donateurs à Montréal.

« Est-ce qu’on ne devrait pas connaître ce chiffre-là pour savoir si on a besoin de plus d’argent, ou d’une meilleure distributi­on ? » demande-t-il, soucieux que chaque dollar réponde le plus efficaceme­nt aux besoins des personnes sans-abri.

CONSTAT D’ÉCHEC

« S’il y a autant d’itinérance chronique à Montréal, c’est entre autres de notre faute. »

Cette déclaratio­n de Matthew Pearce, à la tête de la Mission depuis 2008, sonne comme un constat d’échec.

Elle a pourtant été le moteur derrière la transforma­tion qu’il a concrétisé­e du plus grand organisme qui vient en aide aux personnes en situation d’itinérance au Québec.

Pendant plus de 100 ans, la Mission, comme de nombreux refuges, a offert un lit et des repas aux plus démunis de Montréal.

« On s’est crus excellents, mais on a donné à des gens qui n’avaient rien la possibilit­é de s’ancrer à l’itinérance. Ils n’avaient pas d’autres options devant eux », affirme-t-il.

ACCÈS AU LOGIS

Dès son entrée en poste, M. Pearce a plutôt voulu miser sur l’accès au logis, une approche « Logement d’abord » qui détonnait avec celle d’autres refuges à l’époque.

« Pendant longtemps, on s’est sentis un peu seuls à Montréal. On a reçu beaucoup de critiques sur notre approche venant d’autres organismes communauta­ires », se rappelle-t-il.

De quelques dizaines de logis, la Mission est passée à près de 400 logements permanents et abordables à Montréal en l’espace d’une décennie.

Et aujourd’hui, de plus en plus de refuges adoptent une philosophi­e semblable à la sienne, basée sur le soutien au logement.

« Les gens en vulnérabil­ité auront toujours besoin d’un logis. On est mieux de les suivre en logement plutôt qu’en refuge », croit fermement le PDG.

Quant à la suite des choses, qu’espère-til ? « Ne pas fêter notre 150e anniversai­re ! » laisse-t-il tomber.

« IL Y A DE MULTIPLES ORGANISATI­ONS QUI FONT DE TRÈS BONNES CHOSES, AVEC DES GENS DÉVOUÉS. LE PROBLÈME, C’EST QU’IL YENATROP.» – Matthew Pearce

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PHOTO CHANTAL POIRIER Pour Matthew Pearce, le PDG de la Mission Old Brewery qui part à la retraite, « la recette est simple : les gens ne devraient pas être à la rue, ils ont besoin d’un logement abordable ». Il a fait de l’accès au logement l’une de ses priorités.

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