Le Journal de Montreal

Nos lacs abandonnés

Ceux qui doivent conseiller Québec ne se sont pas réunis depuis un an

- ANNABELLE BLAIS

L’avenir du Conseil québécois de l’eau est compromis avant même que l’organisme ait entamé ses travaux, a appris notre Bureau d’enquête.

La création du Conseil par les libéraux en juin 2018 était une des mesures phares de la Stratégie québécoise de l’eau 2018-2030.

L’instance devait permettre d’améliorer la gestion de la ressource en faisant des recommanda­tions au ministre sur les enjeux prioritair­es et les mesures à mettre en place, tout en l’aidant à les appliquer.

Mais après quelques rencontres en 2019, rien n’a bougé :

√ L’organisme ne s’est pas réuni depuis un an et n’a donc pas pu définir une méthode de travail.

√ Aucune nouvelle rencontre n’est d’ailleurs prévue.

√ Les quelque 40 personnes qui devaient composer ce conseil – des experts, des citoyens, des élus municipaux et autres acteurs du milieu – n’ont toujours pas été nommées.

Notre Bureau d’enquête a appris que le cabinet du ministre de l’Environnem­ent, Benoit Charette, est en fait en « réflexion quant aux suites à donner » au Conseil.

EN RÉFLEXION

« La réflexion porte sur l’instance comme telle, à savoir si la structure qui a été mise en place en 2018 est optimale pour atteindre nos objectifs de protection de l’eau », a confirmé la directrice des communicat­ions du ministre, Isabelle Lewis.

Québec dit vouloir préserver l’expertise des spécialist­es et s’assurer que les citoyens soient impliqués dans la gestion de la ressource, mais se demande si cela doit se faire à travers le Conseil québécois de l’eau comme c’était prévu à sa création.

Le président du Conseil, Alain Webster, dit ne pas avoir d’informatio­n quant à l’avenir de l’instance ou à son fonctionne­ment, mais il reconnaît qu’une décision devra être prise rapidement.

L’ANNÉE DE L’EAU, VRAIMENT ?

2020 devait être l’année de l’eau, nous avait assuré le ministre de l’Environnem­ent, Benoit Charette, l’an dernier à la suite de la parution de notre premier palmarès des pires lacs du Québec.

Ce palmarès, réédité dans notre numéro de samedi, montre que le nombre de lacs qui sont dans un état alarmant a augmenté en un an.

« Clairement, la surveillan­ce, telle qu’elle se fait maintenant, est certaineme­nt déficiente », reconnaiss­ait le ministre.

Mais depuis, il a surtout été question de la politique de gestion des matières résiduelle­s, et les prochains mois seront consacrés au plan pour réduire les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030.

« La pandémie a affecté la gestion de certains dossiers », reconnaît Mme Lewis.

Elle précise toutefois que le ministre est en train d’élaborer des améliorati­ons des suivis du Réseau de surveillan­ce volontaire des lacs (RSVL) afin d’augmenter la quantité de tests d’eau effectués.

Le gouverneme­nt souhaite aussi élargir ce réseau avec un budget de 500 000 $. Ce réseau qui répertorie 827 lacs repose essentiell­ement sur l’implicatio­n de bénévoles.

« Dans les années 80, il y avait de grands programmes d’acquisitio­n de connaissan­ces sur les lacs avec des équipes gouverneme­ntales qui débarquaie­nt en hélicoptèr­e pour avoir un portrait exhaustif de l’ensemble du Québec. On n’est plus du tout dans ce type de suivi », estime Antoine Verville, directeur général du Regroupeme­nt des organismes de bassins versants du Québec.

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PHOTO MARTIN CHEVALIER Les concentrat­ions d’algues bleu-vert dans le lac Millette à Sainte-Adèle sont telles que la baignade devrait y être interdite.

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