La carpe asiatique s’établit au Québec
Cette espèce envahissante et herbivore est une menace pour l’habitat de reproduction de plusieurs poissons
Mauvaise nouvelle pour les pêcheurs : l’envahissante carpe asiatique s’est bel et bien installée au Québec, selon les observations des cinq dernières années faites par le gouvernement provincial.
Les carpes asiatiques sont de voraces herbivores qui peuvent atteindre une très grande taille, de plus d’un mètre, et vivre 20 ans. Se nourrissant d’herbes aquatiques en grande quantité, elles menacent de détruire les habitats propices à la reproduction de plusieurs espèces indigènes.
« Ça ne prend pas grand-chose pour affaiblir les populations de poissons qui sont déjà en déclin », fait remarquer avec inquiétude le président de l’Association des pêcheurs de Longueuil, Théo Gionet.
Tout porte à croire que l’invasion de la carpe asiatique dans les cours d’eau du Québec est commencée. Depuis cinq ans, le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs a décelé des traces d’ADN de carpe de roseau, l’une des quatre espèces de carpe asiatique, dans 43 échantillons d’eau.
BASSIN DE CHAMBLY
Ces données s’ajoutent à la capture d’une deuxième carpe de roseau par un adolescent dans le bassin de Chambly il y a deux semaines.
En 2016, un pêcheur avait aussi sorti de l’eau un énorme spécimen de cette même espèce, à Contrecoeur, également en Montérégie.
Les carpes asiatiques ont d’abord été introduites aux États-Unis dans les bassins de pisciculture, notamment pour aider à les nettoyer. Mais des poissons se seraient échappés, commençant leur progression jusque dans les Grands Lacs.
Ce qui semble aujourd’hui mener ces envahisseurs dans le fleuve Saint-Laurent et ses tributaires. Les traces d’ADN ont été trouvées jusque dans le lac Saint-Pierre et dans les rivières Richelieu et Saint-François.
UNE PREUVE DE SA PRÉSENCE
« Il ne faut pas y voir une mesure de l’abondance, mais plutôt une preuve de la présence par la récurrence des signaux positifs d’année en année », précise le Ministère.
Il confirme que la détection se poursuit aussi cet été malgré la COVID-19.
Le mucus, les écailles ou même les déjections que les poissons laissent derrière eux contiennent de l’ADN, qui est ensuite détecté dans des échantillons d’eau. Seule la carpe de roseau a été décelée au Québec.
Ces traces d’ADN sont précieuses, car « c’est un poisson qui est difficile à capturer », selon le biologiste du Ministère Olivier Morissette. Comme elles sont herbivores, elles mordent peu à l’hameçon, et les carpes peuvent éviter les filets, dit-il.
« Est-ce qu’elle sera capable de se reproduire ici ? » s’interroge désormais Hélène Godmaire, du Conseil québécois des espèces exotiques envahissantes.
La réponse du gouvernement face à la menace « devra être très rapide, car elles se reproduisent d’une façon extraordinaire et elles seront difficiles à combattre quand il y en aura plusieurs », dit-elle.
INTERDICTION
Le Ministère a interdit l’utilisation des poissons-appâts vivants l’hiver et l’été, pour éviter que la carpe asiatique soit aussi introduite de cette façon.
Il appelle aussi les pêcheurs à une grande vigilance pour détecter les carpes asiatiques.