Le Journal de Montreal

De l’amour à la haine

- RICHARD MARTINEAU richard.martineau@quebecorme­dia.com Écoutez Richard Martineau en semaine 8 h ou en tout temps en balado sur qub.radio

Hier, on soulignait les 25 ans du fameux « Love In » de Montréal.

Vous vous souvenez ? Des dizaines de milliers de Canadiens avaient traversé ce beau et grand pays pour venir nous dire qu’ils nous aimaient.

Tout ça, grâce à de généreux donateurs qui avaient la feuille d’érable tatouée sur le coeur – comme la compagnie Irving, qui avait mis des autocars à leur dispositio­n, et Air Canada, qui leur avait vendu des billets d’avion à 10 % du prix.

De belles dépenses qui n’avaient pas été comptabili­sées dans le budget officiel du camp du Non.

LE RÉVEIL DE ROMÉO

Alarmés par les sondages qui montraient le Oui gagnant, les Canadiens se sont soudaineme­nt pris d’un amour éperdu pour le Québec.

C’est fou ce que ça fait, une menace de divorce.

Soudaineme­nt, monsieur, qui jusque-là n’adressait la parole à bobonne que pour lui demander d’aller lui chercher une bière dans le frigo, se vide un flacon d’Aqua Velva derrière les oreilles, achète des fleurs de dépanneur à sa dulcinée et l’amène manger chez Da Giovanni.

« Tu sais que je t’aime, toi ? Oui, je t’aime, je t’ai toujours aimée ! »

Et une fois que madame, excitée par la résurrecti­on de la momie qui lui tenait lieu de mari, appelle son avocat pour annuler son rendez-vous, le bonhomme retourne s’écraser dans son La-Z-Boy, un plat de Doritos entre les genoux.

Et voilà pour la grande séduction !

CHAQUE ÉPOQUE SES FREAK SHOWS

Maintenant, de retour aux affaires courantes.

« Hey, Francine, peux-tu aller me chercher une bière ? »

J’étais au « Love In » de Montréal.

Je n’aurais raté ça pour rien au monde.

Après la femme à barbe du parc Belmont, le Palais des nains de la rue Rachel et le squelette du Géant Beaupré trempant dans le formol : les matantes de Calgary qui débarquent pour nous frencher ! Chaque époque, ses freak shows.

Ça descendait par centaines des autobus. Avec des fleurs de lys plantées dans leur chapeau rouge.

J’ai passé l’après-midi à me faire faire des câlins par des inconnus.

On aurait dit les Shriners en congrès à Milwaukee.

« Love you ! Love you ! Stay in Canada ! »

Ne me quitte pas, il faut oublier, tout peut s’oublier, qui s’enfuit déjà, oublier le temps des malentendu­s, blablabla.

LE « HATE FEST »

Aujourd’hui, nos cousins du ROC ont viré boutte pour boutte.

S’ils le pouvaient, ils reprendrai­ent l’avion pour venir nous cracher dans la figure.

« Fucking Frogs ! Racists ! » Comme Matthew Green du NPD, qui a affirmé cette semaine que le Bloc défendait les suprémacis­tes blancs — tout ça, parce que Yves-François Blanchet, how terribly shocking, could you pass me a Maple Leaf cookie please, a osé prendre position pour la liberté académique.

Ils voulaient qu’on reste, ils rêvent maintenant qu’on parte.

Bof, si vous le demandez si poliment…

Paul St-Pierre Plamondon a raison d’être optimiste.

Les Canadiens nous détestent tellement qu’au prochain référendum, ils vont financer illégaleme­nt le camp du Oui !

Et si, malgré ces dons généreux, nous votons Non pour une troisième fois, deux jours plus tard, ils vont organiser leur propre référendum pour se séparer du Québec !

Que voulez-vous, c’est la vie. En 25 ans, on est passé de jolie bergère à brebis galeuse.

Il y a 25 ans, les Canadiens nous adoraient. Le climat a changé !

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