Le Journal de Montreal

Ex-conseiller­s dévastés par des offres du maire de Saint-Jérôme

Ils ont raconté avec émotion comment on leur avait annoncé leur exclusion

- CÉDÉRICK CARON Stéphane Maher devrait témoigner ce matin pour sa défense. C’est la première fois qu’on entendra sa version des faits.

Les deux anciens conseiller­s municipaux qui se seraient fait offrir un emploi pour ne pas qu’ils briguent un second mandat n’ont pu retenir leurs larmes en témoignant contre le maire de Saint-Jérôme, accusé de manoeuvres électorale­s frauduleus­es.

Émotif, Mario Fauteux a raconté comment s’est déroulée la rencontre dans le bureau du maire Stéphane Maher le 6 octobre 2017, date limite afin de présenter sa candidatur­e pour l’élection générale du 5 novembre suivant.

Maher lui aurait dit qu’il ne pourrait pas se présenter comme conseiller à ses côtés parce que l’Unité permanente anticorrup­tion (UPAC) enquêtait sur une campagne électorale que M. Fauteux avait organisée pour l’ex-maire de Saint-Jérôme, Marc Gascon.

« Il m’a dit que ça allait éclater dans les journaux et qu’il ne pourrait pas me défendre. […] C’est probableme­nt la pire journée politique de ma vie. […] J’étais dévasté. J’étais démoli. J’avais perdu mes points de repère », a relaté M. Fauteux, hier matin au palais de justice de Saint-Jérôme.

Essuyant des larmes, tremblant au point d’avoir de la difficulté à se verser un verre d’eau, M. Fauteux a expliqué avoir eu besoin d’une psychothér­apie et qu’il prend toujours des antidépres­seurs.

Même s’il soutient n’avoir rien à se reprocher, M. Fauteux affirme que cette réunion a sonné le glas de sa carrière politique.

POSTE ACCEPTÉ

Le témoin a finalement accepté le poste de directeur adjoint du futur écocentre régional que lui a offert le maire Maher afin « d’acheter la paix » et de préserver sa réputation.

Rencontré quelques minutes après M. Fauteux, l’ex-conseiller municipal André Marion se serait quant à lui fait offrir un poste dans une future corporatio­n pour la promotion de la culture au centre-ville par le maire. Boulot qu’il a accepté parce qu’il perdait un revenu en ne siégeant plus au conseil.

« J’ai pensé à mon petit garçon qui avait 2 ans à l’époque, a-t-il mentionné en étouffant un sanglot. J’étais renversé [...]. Une chance que je prenais [déjà] des antidépres­seurs ».

Les deux hommes n’ont finalement jamais obtenu les postes proposés.

Selon MM. Marion et Fauteux, le fait d’attendre à la date limite du dépôt des candidatur­es pour leur annoncer leur exclusion était planifié et les empêchait de se représente­r aux élections en raison du délai trop court pour se réorganise­r.

IL REMERCIE LE TÉMOIN

En défense, Me Robert Brunet s’est efforcé de miner la crédibilit­é des deux témoins du Directeur général des élections du Québec (DGEQ), qui poursuit M. Maher.

« C’était beaucoup plus subtil, plus rusé. [...] C’est clair qu’il [Maher] ne m’a pas dit : “Je t’offre ce poste-là pour ne pas que tu te présentes” », a réussi a arracher Me Brunet à M. Marion.

Le maire s’est réjoui de cette réponse en se tournant vers la salle en disant : « Merci ! »

PREUVE TERMINÉE

Les avocates du DGEQ ont décidé de compléter leur preuve après l’audition de deux témoins seulement plutôt que les sept prévus.

Leur preuve est aussi composée d’un enregistre­ment dont la fiabilité avait été débattue lundi, mais que la juge Maria Albanese a finalement admis au dossier. On y entend M. Maher offrir un « emploi prestigieu­x » à M. Fauteux en lui annonçant son exclusion.

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PHOTOS D’ARCHIVES, MARTIN ALAIRE L’ex-conseiller Mario Fauteux, photograph­ié lundi, a été très émotif hier matin au palais de justice de Saint-Jérôme, au procès du maire Stéphane Maher (en mortaise).

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