Le Journal de Montreal

UNE ICÔNE AU CIEL

Craig Simpson et Georges Laraque se remémorent leurs moments avec le préposé au vestiaire des Oilers, décédé à l’âge de 57 ans

- Jean-François Chaumont JFChaumont­JDM

Joey Moss a marqué l’imaginaire des deux principale­s équipes sportives d’Edmonton, les Oilers et les Eskimos. Il n’a jamais marqué un but, il n’a jamais lancé une passe de touché, mais il a gagné le coeur de toute une ville. De tout un pays, même.

À l’âge de 57 ans, Moss a rendu son dernier souffle lundi. Atteint du syndrome de Down (trisomie 21), il a enrichi le paysage des Oilers depuis son embauche comme préposé au vestiaire, lors de la saison 1984-1985.

Aux yeux de Georges Laraque et de Craig Simpson, deux anciens des Oilers, il y a maintenant une étoile de plus dans le ciel.

Pour la petite histoire, il faut savoir que c’est Wayne Gretzky qui avait convaincu les dirigeants des Oilers de lui offrir un emploi. Le numéro 99 fréquentai­t à cette époque Vikki Moss, la soeur de Joey. À l’été 1986, Moss a accepté un poste identique avec les Eskimos.

« Wayne avait une intuition, a raconté hier Craig Simpson en entrevue téléphoniq­ue au Journal. Il avait compris que Joey était pour grandir dans l’environnem­ent des Oilers. Il avait besoin d’un boulot pour se stimuler, pour se sentir valorisé. Il a fait ce métier à merveille pendant 35 ans. Joey a travaillé avec son coeur et son âme. »

« Joey était une icône des Oilers, a renchéri Laraque. Quand j’ai été repêché par les Oilers, ils m’ont rapidement présenté à Joey. Le repêchage en 1995 se déroulait à Edmonton. Joey était à la table des Oilers, il faisait partie des meubles.

« Joey gardait toujours le sourire, il apportait une énergie incroyable dans le vestiaire, a poursuivi Laraque. Il s’amusait avec tout le monde. Quand on avait une mauvaise journée, il venait nous voir. »

SOURIRE CONTAGIEUX

Laraque et Simpson avaient encore le coeur gros au lendemain de son départ. Mais ils refusaient de se laisser envahir par la tristesse, prônant la philosophi­e de Joey selon laquelle il n’y avait pas une seule mauvaise journée sur cette Terre.

« J’ai pleuré au cours des dernières heures, a dit Simpson. J’ai écouté des histoires d’anciens coéquipier­s à la radio qui parlaient de leurs expérience­s avec Joey. Même si je trouve ça triste, je garderai toujours dans ma tête et dans mon coeur le sourire de Joey. Je revois ses clins d’oeil. Je revois ses combats de lutte. Je le revois chanter. Je le revois heureux. Je garderai toujours de belles images. »

Gagnant de deux des cinq conquêtes de la Coupe Stanley des Oilers (1988 et 1990), Simpson le décrit comme un catalyseur.

« Joey a enrichi l’environnem­ent des

« LA VILLE D’EDMONTON NE SERA PLUS LA MÊME SANS TOI, JOEY. MERCI D’AVOIR ENSOLEILLÉ NOS JOURNÉES ET REPOSE EN PAIX. » – Connor McDavid (sur Twitter)

Oilers par sa simple présence. Tous les joueurs qui ont franchi les portes du vestiaire ont une histoire avec Joe. Il y avait un lien qui se créait naturellem­ent entre lui et les joueurs, et ce, pendant un peu plus de 35 ans. »

LA BAMBA

Moss a souvent attiré les caméras vers lui pour ses interpréta­tions des hymnes nationaux. Posté derrière le banc des Oilers, il chantait avec tout son coeur le Ô Canada.

« Joey avait un autre classique et c’était de chanter La Bamba dans le vestiaire de l’équipe, a mentionné Simpson, aujourd’hui analyste pour Sportsnet. Quand nous avions besoin d’un regain d’énergie, nous donnions souvent le plancher à Joe. Il pouvait aussi livrer des discours enflammés dans le vestiaire, surtout un jour d’entraîneme­nt. Il n’avait pas peur de critiquer les joueurs. Les nouveaux avaient besoin de deux ou trois mois pour bien comprendre. Mais ensuite, ils avaient cerné le personnage.

« Trop souvent comme athlète, on oublie le plaisir de jouer, de simplement s’amuser et on se sent étouffé, a enchaîné Simpson. Joey nous permettait de retrouver ce sentiment. Il faisait son travail avec tellement d’amour, de passion et de déterminat­ion. Pour moi, Joey a représenté un facteur X dans les conquêtes de la Coupe Stanley. Il avait son rôle à lui. »

LA LUTTE

Joey Moss avait une autre passion : la lutte. Il avait un partenaire parfait pour exercer ce sport avec Laraque, qui se décrivait à cette époque comme un enfant dans un corps d’homme.

« Joey était un gros fan de lutte, a rappelé Laraque à quelques heures d’animer son émission avec Stéphane Gonzalez sur les ondes du 91,9. Les gens me surnommaie­nt « The Rock » à Edmonton. Nous avions acheté une ceinture de lutte et Joey se promenait souvent avec. Je me battais toujours avec lui. Joey disait qu’il était le champion du monde. Mais j’aimais lui lancer des défis. Les gars nous entouraien­t dans le vestiaire pour former une sortie de ring. Je lui faisais une prise à la Hulk Hogan, mais il finissait toujours par me battre. Il gardait sa ceinture. »

Laraque et Simpson aimeraient maintenant voir les Oilers honorer sa mémoire.

« Joey mérite sa place au plafond du Rogers Place, a clamé Laraque. J’irais même plus loin. Je dis qu’il mérite aussi une statue à côté de Wayne à l’extérieur de l’amphithéât­re. Joey est une icône et il représente aussi un symbole pour les jeunes qui ont le syndrome de Down. Il a inspiré tellement de jeunes dans sa vie. »

« Joey a embelli nos vies et il nous a permis de remettre plusieurs choses en perspectiv­e. Son amour pour la vie procurait un sourire à tous les gens qu’il croisait. »

– Wayne Gretzky (avec Bob Stauffer à l’émission Oilers Now)

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– Esa Tikkanen (sur Twitter) « Un homme qui ne connaissai­t qu’une chose, et c’était de toujours travailler fort. Il ne se plaignait jamais. Du calibre du Temple de la renommée comme préposé au vestiaire. »

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