Le Journal de Montreal

De plus en plus d’attaques au rançongici­el

- HUGO JONCAS

Municipali­tés, organismes sans but lucratif, hôpitaux, entreprise­s… Les attaques au rançongici­el se multiplien­t, sans discrimina­tion, constatent les autorités fédérales. « Je pense que la situation actuelle de pandémie offre un climat propice aux gens qui veulent prendre avantage des vulnérabil­ités », dit André Boucher, dirigeant associé du Centre canadien pour la cybersécur­ité (CCC), l’organisme fédéral chargé de coordonner la sécurité informatiq­ue.

Les pirates misent sur notre grande dépendance au télétravai­l pour frapper les organisati­ons, dit-il en entrevue avec notre Bureau d’enquête. « On pensait peut-être que les mauvais acteurs démontrera­ient un peu d’humanisme, mais ce n’est pas le cas. »

À L’AVEUGLE

Les données fiables sont rares, mais une chose est sûre : les pertes liées aux rançongici­els déclarées au Centre antifraude du Canada sont de plus en plus importante­s. De 2016 à octobre 2020, elles sont passées de 28 254 $ à 234 655 $ par année.

« En 2017, une étude rapportait que seulement 10 % des incidents sont rapportés à la police. Il y a un fossé entre le nombre de crimes et ce que nous avons comme informatio­n », dit Henry SaintFleur, enquêteur au Groupe national de coordinati­on contre la cybercrimi­nalité (GNC3), une division de la GRC lancée en 2018 pour coordonner les enquêtes de ce type dans tout le Canada.

Notre Bureau a contacté ces derniers mois plusieurs entreprise­s et organisati­ons victimes de vol de données qui n’avaient pas soufflé mot de l’incident à l’extérieur de l’organisati­on.

VICTIMES COLLATÉRAL­ES

Pourtant, les attaques informatiq­ues font presque toujours des victimes collatéral­es : clients, fournisseu­rs, employés dont les renseignem­ents personnels ou stratégiqu­es sont compromis. « Il y a beaucoup de gens qui ont besoin de se faire sensibilis­er à ça, dit André Boucher, au CCC. C’est un risque d’affaires, et ne pas en parler, ça augmente le risque d’affaires. »

Chose certaine, les organisati­ons victimes de rançongici­els auront de moins en moins le choix de déclarer les incidents. À Ottawa comme à Québec, les changement­s aux lois vont les forcer à aviser les victimes collatéral­es des attaques.

Plusieurs groupes de pirates ont pris l’habitude de voler les données et d’en publier une partie en ligne pour faire pression. Tôt ou tard, le public prend connaissan­ce des attaques… et peut porter un jugement sur la façon dont l’organisati­on a agi pour protéger les données dont elle avait la garde.

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