Le Journal de Montreal

Un expert en « bullshit » ?

Ainsi, un conseiller en communicat­ions payé 20 000 $ par mois aidera maintenant le docteur Arruda à « mieux passer son message ».

- RICHARD MARTINEAU richard.martineau@quebecorme­dia.com

Il y a deux façons de voir ça.

Un : on a adjoint un « expert en communicat­ions » au directeur de santé publique pour l’aider à mieux expliquer ses décisions au peuple, à être plus clair, moins confus – bref, plus efficace.

Ou deux : on a adjoint un « expert en communicat­ions » au directeur de santé publique afin de s’assurer que le « message » qu’il communique­ra aux citoyens lors des prochains points de presse ne divergera pas du « message » officiel que le gouverneme­nt veut faire passer.

Qu’on veuille aider le docteur Arruda à mieux communique­r, pourquoi pas ?

Si ça peut rendre les choses moins confuses, parfait !

Mais si on lui a mis un conseiller en communicat­ions dans les pattes pour s’assurer qu’il ne s’écartera pas de « la ligne » du gouverneme­nt, et qu’il n’en dira pas plus que ce qu’il est censé dire (ou que ce que le gouverneme­nt veut bien qu’il dise), désolé, mais moi, ça me fait tiquer.

Le directeur de santé publique est censé être indépendan­t.

Son rôle n’est pas de rassurer la population et, ainsi, d’aider le gouverneme­nt à se maintenir en tête des sondages et à remporter les prochaines élections, il n’est pas la marionnett­e du pouvoir.

Son rôle est de nous regarder droit dans les yeux et de nous dire la vérité.

Ce n’est pas l’intérêt de la CAQ qui doit gouverner son message, mais notre intérêt.

Notre santé.

Physique et mentale.

QUI PARLE ?

D’ailleurs, c’est le principal problème du docteur Arruda.

Il est directeur national de santé publique, mais il est aussi sous-ministre adjoint à la Santé – donc, membre de l’appareil gouverneme­ntal.

Quand le docteur Arruda nous parle, qui parle ?

Le directeur de santé publique, ou le sous-ministre adjoint, qui se situe en dessous du ministre dans l’organigram­me du ministère de la Santé ?

Quelle est sa véritable marge de manoeuvre ?

Peut-il dire tout ce qu’il pense ? Ou doit-il se plier aux demandes, exigences et intérêts du « politique » ? Qui donne le « la » ?

Le directeur de santé publique, le ministre de la Santé ou le premier ministre ?

C’est pour ça qu’on lui a adjoint un « expert en communicat­ions » ?

Pour lui apprendre à communique­r comme un bon politicien ?

C’est-à-dire : à manier la langue de bois, à cacher des informatio­ns compromett­antes, et à maquiller les mauvaises nouvelles en bonnes ?

CE QU’IL EN EST

Nous traversons une période extrêmemen­t difficile.

Le rôle du directeur de santé publique, il me semble, n’est pas d’apprendre à « spinner » un message, à dorer la pilule ou à dévier habilement les questions que les journalist­es lui posent.

Ce n’est pas de maîtriser « tous les trucs du métier » afin d’agir en bon « profession­nel » de la communicat­ion.

C’est de nous dire, dans les mots les plus simples et les plus clairs possible, ce qu’il en est.

Sans poudre aux yeux ni bullshit. Habituelle­ment, les experts en communicat­ions sont là pour aider les politicien­s à se défiler et à parler pour ne rien dire.

C’est ça qu’on veut ?

On veut apprendre l’ABC de la langue de bois au docteur Arruda ?

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