La délicate tâche de définir la cuisine autochtone
Maxime Lizotte, 24 ans, est chef propriétaire du Wigwam, service de chef privé à domicile et entreprise d’alimentation. Sa cuisine, qu’il décrit comme une gastronomie autochtone contemporaine, se base sur les trois grands principes suivants : locale, responsable et avant-gardiste. Quand on lui demande de définir la cuisine autochtone, il répond ceci : « Pour moi, c’est une cuisine qui va aller rechercher les valeurs selon lesquelles vivaient mes ancêtres, les Premières Nations. Le respect de la Terre mère, c’est le fondement principal de ce qu’est pour moi la cuisine autochtone. » Il ajoute qu’elle est difficile à circonscrire, car elle a évolué; « elle est super ancienne, mais elle a évolué, et ce qu’on considère comme traditionnel est souvent subjectif ». Il donne l’exemple du pain bannique qu’on associe à la gastronomie autochtone, alors qu’il était fait avec du blé importé par les Européens. Même chose pour le saumon fumé; aujourd’hui, celui qu’on mange est saumuré avant d’être fumé, mais à l’époque, les Autochtones n’avaient pas de sel, ce sont les Européens qui l’ont introduit. Donc, est-ce que le pain bannique et le saumon fumé sont de véritables traditions autochtones? Oui, mais elles ont évolué! Pour illustrer son point, le chef invoque son flanc de porc laqué au miso, qui est un assaisonnement asiatique, mais qu’il fait lui-même à partir d’ingrédients bio québécois. Il le sert avec un kimchi, une choucroute coréenne qu’il prépare également avec des ingrédients locaux et biologiques. Il pose donc la question : « À quel point ce plat d’influence asiatique, qui respecte toutes les valeurs des Premières Nations, est plus autochtone qu’un contre-filet d’orignal accompagné de carottes en provenance du Guatemala? » Selon lui, c’est davantage les valeurs imprégnant sa cuisine, plutôt qu’une liste d’ingrédients stéréotypés, qui permettent de la définir comme étant de la gastronomie autochtone. Dans le même esprit, il s’adonne à la cueillette de plantes sauvages comestibles, activité pratiquée par les peuples autochtones avant la colonisation, qui était un peu délaissée et qui revient en force. « Il y a un regain d’intérêt envers les plantes sauvages de nos forêts, de nos bords de lac, de nos rivières, etc. » Se procurer ses ingrédients à proximité sur le territoire s’inscrit dans cette volonté de préserver la planète qui nous fait vivre. Cuisine de survivance à la base qui a su s’adapter et se moderniser, qu’il faut s’efforcer de sauvegarder vu la fragilité de la tradition orale par laquelle elle s’est transmise, aussi multiple que toutes les nations qui la composent, la gastronomie autochtone est, selon Maxime, « une cuisine d’aujourd’hui qui respecte la Terre mère avant toute chose ». Pour découvrir son travail et ses mélanges d’assaisonnements Origine Boréale :