Le Journal de Montreal

Le gouverneme­nt Trudeau rit de nous

- MICHEL GIRARD

Concernant la Subvention salariale d’urgence du Canada (SSUC), les entreprise­s bénéficiai­res pouvaient continuer de racheter leurs actions en Bourse, verser des dividendes et hausser la rémunérati­on de la haute direction même si elles ont reçu la SSUC.

Le seul changement qu’introduit le gouverneme­nt Trudeau sera le remboursem­ent d’une portion de la SSUC obtenue après le 5 juin 2021 (jusqu’au 25 septembre) si la haute direction empoche en 2021 une rémunérati­on globale supérieure à celle de 2019. Ai-je bien compris ?

C’est la question que j’ai posée au cabinet de la vice-première ministre et ministre des Finances, Chrystia Freeland, à la suite de la présentati­on de son premier budget fédéral, lundi dernier.

Réponse du ministère des Finances à ma question : « Oui. »

LA SSUC À 100 MILLIARDS $

Le ministère des Finances a cependant tenu à me rappeler que : « La Subvention salariale d’urgence du Canada a été conçue pour protéger les emplois au Canada. Cette mesure de soutien a déjà aidé plus de cinq millions de Canadiens à conserver leur emploi et vise les entreprise­s de toutes les tailles et dans tous les secteurs afin qu’aucun travailleu­r ne tombe entre les mailles du filet. »

En moins de 15 mois, soit de la mi-mars 2020 au 5 juin 2021, le gouverneme­nt Trudeau aura versé la fabuleuse somme de 100 milliards de dollars en subvention salariale d’urgence dans le dessein d’aider les entreprise­s à payer leurs employés durant la grave crise liée à la pandémie de COVID-19.

LA GAFFE

Ce n’est pas la subvention salariale en elle-même qui fait problème.

À mon avis, le gouverneme­nt Trudeau a commis une gaffe monumental­e en accordant la généreuse Subvention salariale d’urgence Canada sans assujettir les entreprise­s bénéficiai­res à des restrictio­ns élémentair­es lorsqu’il s’agit d’octroi de fonds publics.

Par restrictio­ns élémentair­es, je fais référence, entre autres, à l’interdicti­on de racheter ses actions, de verser des dividendes aux actionnair­es, d’augmenter la rémunérati­on des dirigeants des entreprise­s bénéficiai­res durant l’année ou les années où elles reçoivent ladite SSUC.

Sur les 440 580 entreprise­s qui ont bénéficié jusqu’à présent de la SSUC, combien d’entre elles ont eu le culot d’augmenter en 2020 la rémunérati­on de leurs dirigeants, comme ce fut le cas chez la multinatio­nale SNC-Lavalin avec sa haute direction ?

TIMIDE CORRECTIF

Dans le cadre de son nouveau budget, le gouverneme­nt Trudeau a finalement décidé d’imposer une contrainte.

« Le budget 2021 propose d’exiger que toute société cotée en Bourse qui reçoit la subvention salariale et qui verse à ses cadres supérieurs une rémunérati­on plus élevée en 2021 qu’en 2019 rembourse les montants équivalent­s de subvention salariale reçus pour toute période admissible à compter du 5 juin 2021 et jusqu’à la fin du programme de la subvention salariale. »

Comme vous voyez, la contrainte ne porte que sur la prolongati­on de la subvention salariale d’urgence du Canada à partir de juin prochain. On parle ici d’une prolongati­on de la SSUC d’un coût de 10 milliards de dollars, alors que le gouverneme­nt fédéral aura versé précédemme­nt 100 milliards de dollars sans la moindre restrictio­n.

Et le remboursem­ent de la SSUC ne vise que les entreprise­s cotées en Bourse et ne porte que sur le montant de la rémunérati­on excédant celle de 2019.

Les dirigeants des entreprise­s privées ne sont pas visés.

Le gouverneme­nt Trudeau rit de nous dans ce dossier.

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