Le Journal de Montreal

Respect pour les proches aidants

- JOSÉE LEGAULT josee.legault@quebecorme­dia.com

Marguerite Blais ne s’en est jamais cachée. La principale raison de son retour en politique était le dossier trop longtemps négligé des proches aidants. Lorsqu’en 2018, François Legault a voulu recruter l’ex-ministre libérale, cette condition, pour elle, était non négociable.

Résultat : une fois élue, à son titre de ministre des Aînés, s’est ajoutée la responsabi­lité des Proches aidants – une première au Québec. Elle a tenu parole. L’automne dernier, elle faisait adopter la première loi-cadre pour les personnes proches aidantes.

Hier, elle l’a fait suivre de la première politique nationale du même nom. Dans six mois, la boucle sera bouclée avec un nouveau Plan d’action gouverneme­ntal. Ce sont toutes là des « premières » majeures.

Au Québec, les proches aidants comptent pour 1,6 million de personnes. Ajoutez les êtres chers dont ils prennent soin avec amour, on parle de 3 millions de Québécois. C’est beaucoup de monde.

SANS EUX, LE SYSTÈME S’ÉCROULERAI­T

Disons-le, sans le travail acharné, mais non rémunéré des aidants – majoritair­ement des femmes –, notre système de santé et de services sociaux, déjà dysfonctio­nnel, s’écroulerai­t carrément.

Ignoré néanmoins par les gouverneme­nts précédents, l’épuisement physique, émotif et financier les grugeait déjà bien avant la pandémie. Pour plusieurs, elle les aura précipités dans un isolement d’autant plus grand.

Moi-même aidante de ma soeur handicapée intellectu­elle, j’en sais quelque chose. Rien ne va plus. D’où l’importance, pour l’avenir, de cette nouvelle politique nationale.

Elle reconnaîtr­a chaque aidant, de TOUS les âges, « comme une personne à part entière qui doit être traitée avec dignité et sollicitud­e ». Après toutes ces années d’invisibili­té cruelle, ce n’est pas anodin.

Si les ressources humaines et financière­s suivent – toujours le « si » déterminan­t –, cela obligerait le réseau de santé et services sociaux à soutenir l’aidant, au même titre que l’« aidé », par un « plan d’accompagne­ment ». Ce qui voudrait dire exister. Enfin.

Imaginons ça. La santé mentale, physique et financière de la personne aidante serait aussi prise en compte. Si cela se concrétise un jour – l’autre gros « si » –, pour notre bureaucrat­ie déshumanis­ante, ce serait une véritable révolution culturelle.

La politique nationale de la ministre Marguerite Blais reconnaît les proches aidants comme des personnes à part entière devant être traitées avec dignité et sollicitud­e.

BOUGER ENFIN

Le manque criant de soins et de soutien à domicile devra donc être corrigé. Pour ce faire, il faudra aussi s’assurer que les fonds publics allant à la nouvelle politique ne seront pas happés par les méga-CIUSSS pour d’autres choses, dont les hôpitaux, mais qu’ils se rendront vraiment sur le « terrain ».

Déterminée, la ministre Blais jure qu’elle veillera au grain. Ceux qui la connaissen­t de près la savent capable de convaincre son premier ministre et ses collègues de bouger quand il le faut.

Pour les proches aidants, elle y travaille depuis plus de deux ans. Elle a multiplié les consultati­ons avec de nombreux spécialist­es et organismes. Elle-même proche aidante de son mari décédé depuis, elle a écouté une multitude de récits déchirants venus d’aidants au bout du rouleau depuis un bail.

Transparen­ce totale : ayant participé à un de ses forums de consultati­on comme aidante, j’en ai été témoin. On n’y comptait plus les prises de parole aussi libres que poignantes.

La politique, on le sait, sert parfois des intérêts purement privés. Mais il arrive aussi qu’elle serve le bien commun. Pour les proches aidants, Marguerite Blais, les yeux tournés vers les prochaines génération­s, le fait avec passion.

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