Conducteur acquitté à cause du cafouillage des policiers
Le jeune homme avait percuté deux adolescentes de 16 ans au mois d’août 2017
Dépitées que le conducteur qui a happé mortellement leurs filles s’en tire à cause d’une bourde de la police, deux familles de l’Abitibi lancent un cri du coeur contre le cellulaire au volant.
« La justice, c’était important pour moi, pour accepter la mort de ma fille. C’est une claque d’apprendre qu’il s’en sort à cause de lacunes des policiers », lance Valérie Champagne, la mère de Camille Lacombe, fauchée à mort en août 2017.
Au moment du drame, l’adolescente marchait sur l’accotement du chemin Granada, à Rouyn-Noranda, en compagnie de sa cousine, Shana Rochon. Les deux jeunes de 16 ans ont été happées par un véhicule qui a dévié de sa voie.
Le conducteur, Mathieu Desgagné, alors âgé de 21 ans, avait été accusé de conduite dangereuse et de négligence criminelle causant la mort des deux adolescentes.
Mais l’accusé a été acquitté hier, à cause de bourdes d’enquêteurs de la Sûreté du Québec qui l’ont rencontré et interrogé après la collision mortelle.
Le juge Thierry Potvin avait en effet rejeté en mars dernier des preuves importantes, obtenues en violation des droits de l’accusé.
Soupçonnant que Desgagné avait échangé des textos dans les instants avant le drame, les policiers ont fouillé dans son cellulaire, sans que le jeune homme soit informé de ses droits de quitter, de garder le silence et de contacter un avocat.
Les enquêteurs ont quand même pu voir qu’un message texte avait été envoyé peu avant la collision, rapportait le juge Potvin dans un récent jugement sur l’analyse de la preuve.
PAS D’AUTRES PREUVES
Desgagné a ensuite été interrogé quelques jours après, pendant plus de dix heures. Mais cet interrogatoire en règle n’aurait jamais eu lieu sans la déclaration obtenue illégalement et sans la fouille abusive de son cellulaire, avait conclu le magistrat, en rejetant la preuve.
La Couronne a indiqué hier ne pas avoir d’autres preuves à offrir, ainsi, le juge Potvin a dû acquitter Mathieu Desgagné.
Les parents de Shana Rochon et de Camille Lacombe se désolent que justice n’ait pas été rendue pour leur fille.
Ils auraient souhaité qu’un procès ait lieu afin qu’un débat puisse se tenir sur le fléau du cellulaire au volant.
« J’aurais aimé que leur mort serve à quelque chose, qu’on puisse lancer un message, que ma fille ne soit pas morte en vain », s’insurge Valérie Champagne.
Mère d’un garçon qui sera bientôt en âge de conduire, elle dit vouloir militer pour sensibiliser les jeunes et les usagers de la route.
« Le cellulaire au volant, c’est un fléau. Je veux en faire une cause. Je veux que les jeunes comprennent que ça détruit des vies, ça détruit des familles », explique-t-elle.
PAS DE TEXTOS EN CONDUISANT
« Quand je suis témoin de gens qui tiennent leur cellulaire alors qu’ils conduisent, ça m’enrage. J’ai envie de descendre de mon véhicule, d’aller cogner à leur fenêtre et de leur dire : allumez ! », ajoute-t-elle.
Pour sa part, le père de Shana Rochon peine à croire qu’en 2021, aucune technologie ne permette de rendre complètement inaccessible le cellulaire lorsque l’on conduit.
« Dès qu’on prend la route, on ne devrait pas pouvoir avoir accès aux réseaux sociaux ou aux textos », dit Stéphane Rochon.