Le Journal de Montreal

À Ottawa, c’est toujours non

- RÉMI NADEAU Chef du Bureau parlementa­ire à Québec Benoit Pelletier

Malgré le front commun avec les autres provinces, et malgré le contexte de pandémie qui a exacerbé l’ampleur des besoins, Justin Trudeau a encore refusé net la demande du Québec d’augmenter les transferts en santé. Et le gouverneme­nt Legault n’a pas haussé le ton.

Les premiers ministres des provinces, le président du Conseil de la fédération François Legault en tête, ont martelé depuis deux ans qu’Ottawa devait rétablir sa part de financemen­t de la santé à 35 %, plutôt qu’à 22 % comme c’est le cas à l’heure actuelle.

L’enjeu est une somme de 6 milliards annuelleme­nt pour le Québec, qui viendrait effacer son déséquilib­re structurel.

C’était déjà crucial avant l’apparition de la COVID-19. Ça l’est davantage depuis que le gouverneme­nt Legault a dû embaucher près de 10 000 préposés aux bénéficiai­res de plus, des patrons dans chaque CHSLD, et qu’il devra créer 1500 postes dans le cadre de son entente avec les infirmière­s.

Mais Justin Trudeau a dit non. Il préfère créer un réseau national de garderies en piétinant les compétence­s des provinces. Il est étonnant qu’il ne comprenne pas l’urgence de ces nouveaux investisse­ments en santé. Et ce, alors qu’il se comporte comme un jeune découvrant les plaisirs du crédit, sans réaliser la responsabi­lité de rembourser.

Non seulement il n’y a pas de limite aux déficits gargantues­ques accumulés, mais il détourne les yeux des besoins criants et dépense ailleurs sans compter. Ce refus ressemble à une tradition à perpétuer à l’égard des revendicat­ions du Québec, regardé de haut.

Comme lorsque Justin a fermé la porte, avec dédain, à la demande d’un rapport d’impôt unique au Québec, qu’avait réclamé haut et fort François Legault.

NOUS AURIONS APPRÉCIÉ...

Au lendemain du budget fédéral aux odeurs de défaite, est-ce que le ministre québécois des Finances a cogné du poing sur la table à s’en rougir les jointures ? Non. « Nous aurions apprécié une augmentati­on du transfert canadien en santé », a déclaré timidement Eric Girard, ajoutant qu’il n’était pas « surpris » du refus.

Parce que Justin avait précédemme­nt annoncé qu’il n’était pas question de bouger sur cette question pendant la pandémie. Mais en quoi diable est-ce plus urgent de créer un réseau national de garderies ?

Bref, le ministre Girard n’a pas déchiré sa chemise ni brûlé son veston. Mais il a répété que les provinces reviendrai­ent à la charge.

Mardi, François Legault se montrait timoré aussi, même s’il a enjoint à Justin Trudeau de cesser de jouer le « papa » avec les provinces.

LA COMPENSATI­ON

Le premier ministre caquiste s’est réjoui d’une compensati­on qui nous sera versée. Parce que, contrairem­ent aux autres provinces qui profiteron­t du soutien fédéral pour le faire, le Québec a déjà développé par lui-même son réseau de services de garde.

La somme sera de 680 millions $ cette année et s’élèvera à 1,8 milliard en 2025. Mais en affirmant que « ça peut nous aider à régler une petite partie de notre problème financier », il me semble que M. Legault se fait entourloup­er.

En toute logique, il faudrait que le fédéral verse d’abord la hausse de transferts en santé. Et si, après, Justin Trudeau veut se créer un réseau de garderies, qu’il verse en sus cette compensati­on que mérite le Québec.

Le libéral André Fortin a attaqué le chef caquiste, qui promettait de batailler ferme, et qui a frappé le mur de l’indifféren­ce d’Ottawa.

Mais sa sortie s’est retournée contre lui comme s’il avait marché sur un râteau. Le précédent gouverneme­nt Couillard ayant été reconnu pour sa mollesse devant ce même mur unifolié, les libéraux habitent un refuge de verre d’où ils peuvent difficilem­ent lancer des pierres ! Pour François Legault, faire des gains auprès du fédéral constituer­a un de ses beaux défis post-pandémie.

C’est à lui de montrer que sa posture nationalis­te peut permettre de faire mieux que picorer des miettes laissées par Ottawa.

Le ministre des Finances Eric Girard a un déficit structurel de 6 milliards qu’il aimerait régler avec une hausse équivalent­e des transferts en santé, mais le fédéral dit encore non.

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