Le Journal de Montreal

Parcours du combattant pour être indemnisée

- ROXANE TRUDEL

Épuisée après des années de lutte pour être indemnisée, une victime de violence conjugale n’a toujours pas obtenu l’aide financière à laquelle elle était admissible pour passer au travers de ce douloureux moment.

« J’ai vécu sur pause pendant des années parce qu’on n’a pas reconnu ce qu’on reconnaît aujourd’hui. J’hallucine de devoir me battre à ce point pour de l’aide », dénonce la victime, qui a demandé à conserver l’anonymat puisque son dossier n’est pas clos.

Sur ses genoux, Diane (nom fictif) tient la pile de tous les échanges qu’elle a eus avec l’Indemnisat­ion des victimes d’actes criminels (IVAC) depuis 2018, un mois après avoir quitté en trombe son conjoint violent.

Sans logement, sans meubles, sans argent, la mère de cinq enfants a dû reconstrui­re sa vie du tout au tout.

« Je suis une mère monoparent­ale. Juste pour me trouver un appartemen­t, ç’a été l’horreur », confie celle qui a eu recours à l’aide sociale.

PREUVE APRÈS PREUVE

Car si elle a rapidement eu accès à un suivi psychologi­que offert par l’IVAC grâce aux accusation­s criminelle­s portées contre son ex, l’indemnisat­ion a été une tout autre paire de manches.

Au début, on lui demandait de prouver que son choc post-traumatiqu­e était exclusivem­ent lié à ses années auprès de monsieur. Ce dernier a plaidé coupable de voies de fait et de harcèlemen­t à son endroit.

« Pour mon médecin, le lien était immédiat », précise-t-elle.

La demande a été acceptée… avant d’être refusée à nouveau, sous prétexte que la dame n’étudiait pas à temps plein au moment des faits.

Puis, même avec des papiers en ordre, elle a essuyé des refus dans ses demandes de révision, pour des motifs de « délais écoulés ». Elle s’est finalement tournée vers le tribunal administra­tif pour contester la décision.

À BOUT, PLUS CAPABLE

Entre-temps, l’IVAC a de nouveau vérifié son dossier et lui accorde désormais l’indemnisat­ion qu’elle aurait dû avoir depuis des années.

« Vous avez fait valoir vos droits dans le délai prévu à la loi », a admis l’organisme en mars.

« Épuisée, à bout », elle estime qu’il faut absolument revoir le système d’indemnisat­ion aux victimes.

« C’est beau, de dire à une victime de violence conjugale : “va-t’en”, mais quand tu t’en vas, tu n’as plus rien », indique-t-elle.

« [L’IVAC] met tout en oeuvre pour que les dossiers soient traités dans les meilleurs délais et dans le respect du cadre légal », a réagi l’organisme.

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