Mlle Expos monnaye enfin sa passion
La dessinatrice québécoise se consacre à la création de cartes de baseball, très populaires aux États-Unis
À l’intérieur de Montréal, le journaliste Louis-Philippe Messier se déplace surtout à la course, son bureau dans son sac à dos, à l’affût de sujets et de gens fascinants. Il parle à tout le monde et s’intéresse à tous les milieux dans cette chronique urbaine.
Au milieu des années 1980, la petite Josée Tellier aperçoit le charismatique voltigeur des Expos de Montréal Andre Dawson à la télévision. C’est le coup de foudre.
De là naît sa passion pour le baseball. Déménagée de North Hatley, en Estrie, à Montréal en 1999, elle devient une assidue du Stade olympique... jusqu’à la défection de ses Amours pour Washington en 2004.
« J’ai voyagé pour visiter les 30 stades des ligues majeures de l’époque », se souvient celle qui assistait à une quarantaine de matchs des Expos par an.
Connue dans le monde de l’édition, celle qui se sait vouée au métier de dessinatrice depuis l’âge de 5 ans a notamment conçu les couvertures de la collection « Racontemoi » et de la série Le Journal d’Aurélie Laflamme.
À l’occasion du 50e anniversaire de l’ancienne équipe montréalaise, en 2019, elle a illustré 50 de ses anciens joueurs marquants. Impressionnés, les organisateurs lui ont demandé la permission de projeter ses dessins sur l’écran du stade pendant la cérémonie.
« Ç’a été un des plus grands buzz de ma carrière », se souvient celle dont la salle à manger est ornée d’un autel honorant des icônes des Expos et dont le salon a pour fait saillant décoratif une tête de chevreuil coiffée d’une casquette des Expos.
À 10 jours de réaliser son rêve de rencontrer son fantasmatique Andre Dawson, en mars 2020, à l’occasion d’un gala à Montréal, le confinement est décrété.
L’hiver 2020-2021 lui assène une double gifle. Elle perd son père et sa mère à un mois d’intervalle. Pendant une saison, nulle envie de dessiner.
SAUVÉE PAR YOGI BERRA
Avec son compte Twitter MissTellier, elle suit néanmoins l’actualité du baseball. Scandalisée par deux nouvelles cartes représentant Yogi Berra, le mythique receveur des Yankees de New York des années 1950, qu’elle juge irrespectueuses, elle a l’idée de dessiner la sienne !
Sur Twitter à la fin d’avril, la carte suscite un engouement qui déconcerte sa créatrice. Elle en imprime 50 et vend tout en 36 heures.
« C’est Yogi Berra qui m’a redonné la vie ! » résume-t-elle.
Début mai, pour les 90 ans de Willie Mays, elle lui consacre une carte imprimée à 90 exemplaires, tous envolés en quelques jours, dans sa boutique Etsy MissTellier.
La Fondation Josh Gibson, le légendaire joueur des ligues noires américaines, lance ensuite un concours de cartes. Josée Tellier vend vite les 100 exemplaires de la sienne à 40 $, son plus haut prix jusqu’à maintenant. La moitié des bénéfices va à la Fondation Josh Gibson pour la jeunesse. Elle gagne le concours contre 74 autres dessinateurs et sera invitée d’honneur à un gala à Pittsburgh en octobre.
NEUF AUTRES CARTES
L’artiste de 45 ans (« l’âge du stade », faitelle remarquer) prépare maintenant une carte de Hank Aaron et entend consacrer neuf autres cartes à des légendes telles que Babe Ruth. Difficile de dire à quoi finiront par s’élever ses tirages et son prix.
« J’avais sous-estimé la demande pour les cartes de baseball », dit celle qui a récemment quitté son emploi de directrice artistique d’une compagnie de vêtements pour se consacrer à la carte de sport.
Je lui souhaite tout le succès qu’elle mérite… et de rencontrer Andre Dawson.