Le Journal de Montreal

Les journalist­es n’auront plus à révéler leurs sources

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WASHINGTON | (AFP) L’administra­tion de Joe Biden a interdit hier aux procureurs fédéraux des États-Unis d’utiliser des mandats ou des convocatio­ns judiciaire­s pour découvrir les sources des journalist­es, après la révélation d’efforts de cette nature sous Donald Trump.

« Le ministère de la Justice n’utilisera plus le processus juridique obligatoir­e dans le but d’obtenir des données sur des membres des médias liées à leurs activités de collecte de l’informatio­n », écrit le ministre Merrick Garland dans une directive adressée aux procureurs fédéraux.

La nouvelle règle s’applique également à la diffusion d’informatio­ns classifiée­s, précise-t-il, ce qui représente un important revirement réclamé depuis des années par les associatio­ns de défense de la liberté de la presse.

Les procureurs conservent toutefois l’usage de leur arsenal judiciaire contre les personnes soupçonnée­s d’être à l’origine de fuites d’informatio­ns confidenti­elles.

EXCEPTIONS

La directive prévoit aussi quelques exceptions : si le journalist­e est soupçonné d’avoir commis un acte illégal, par exemple un délit d’initié, ou d’avoir utilisé une méthode interdite, comme l’intrusion dans des systèmes protégés ; ou encore s’il s’agit d’empêcher qu’un acte grave (enlèvement, attentat...) soit commis.

Pour faire en sorte que la mesure dure dans le temps, Merrick Garland demande à ses services d’examiner l’ensemble des règles liées aux journalist­es en vue de favoriser l’adoption d’une loi au Congrès.

Cette réforme fait suite à la révélation d’une bataille juridique menée en catimini par le gouverneme­nt Trump pour se procurer les courriels de reporters du New York

Times afin de découvrir leurs sources. La chaîne CNN et le quotidien

Washington Post ont également fait savoir que la précédente administra­tion avait, en cachette, cherché et obtenu les enregistre­ments téléphoniq­ues et courriers électroniq­ues de membres de leur rédaction.

PRISON

Aux États-Unis, la fuite d’informatio­ns classifiée­s est illégale en vertu d’une loi sur l’espionnage datant de 1917.

Des procureurs fédéraux pouvaient jusqu’ici lancer des mandats, notamment auprès des compagnies téléphoniq­ues ou des géants de la tech, pour remonter à la source des fuites, voire inculper ou arrêter des journalist­es pour découvrir leurs auteurs.

Tous les gouverneme­nts, républicai­ns comme démocrates, ont eu recours à ces armes juridiques.

Le cas le plus emblématiq­ue est celui de la journalist­e Judith Miller, qui, en 2005, a passé près de trois mois en prison parce qu’elle ne voulait pas révéler ses sources, dans une affaire de divulgatio­n de l’identité d’une agente de la CIA.

Après un scandale en 2013, le gouverneme­nt de Barack Obama avait créé de nouvelles règles et imposé d’obtenir un feu vert de hauts responsabl­es du ministère de la Justice pour tout mandat contre des journalist­es, sans renoncer à la pratique.

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