Le Journal de Montreal

Pegasus : un mouchard informatiq­ue dans vos poches

- NORMAND LESTER normand.lester@quebecorme­dia.com

Les téléphones intelligen­ts (bientôt des implants ?) sont devenus des assistants indispensa­bles à nos capacités cognitives. Ils sont aussi des mouchards informatiq­ues qui menacent le concept même de vie privée et de confidenti­alité de l’informatio­n.

Le savoir que nous accumulons et que nous communiquo­ns est maintenant accessible à quiconque a les moyens d’acheter les services de sociétés d’espionnage numérique privées comme le NSO Group israélien.

LA TERRE ENTIÈRE À LA PORTÉE DU LOGICIEL-ESPION

Un consortium internatio­nal de journalist­es appelé « Forbidden Stories » publie actuelleme­nt une série de révélation­s sur NSO Group et son logiciel-espion Pegasus. L’enquête est basée sur une liste de numéros de téléphone de personnes qui auraient été des cibles potentiell­es de clients de NSO depuis 2016.

Elle comprend les noms de 89 journalist­es, de 85 militants des droits de l’homme, d’au moins 65 dirigeants d’entreprise et de plus de 600 hommes politiques et responsabl­es gouverneme­ntaux, dont plusieurs premiers ministres et chefs d’État. Les médias membres du consortium promettent d’autres exclusivit­és sensationn­elles dans les prochains jours.

Le NSO Group a immédiatem­ent réagi en affirmant que le rapport était « plein d’hypothèses erronées et de théories non corroborée­s ».

Le logiciel-espion Pegasus peut se servir de la caméra et du microphone du téléphone et accéder à toutes les données sur l’appareil. La personne ciblée se promène avec un espion dans sa poche qui enregistre tout ce qu’elle fait.

NSO a déclaré que le logiciel Pegasus était uniquement destiné à collecter des données sur des individus soupçonnés d’être des criminels ou des terroriste­s. Ah bon ! Ses clients s’engagent à ne pas utiliser Pegasus à des fins illégales. Ouf ! ça me rassure. Le NSO group a même retiré son logiciel à plusieurs de ses clients pour ne pas avoir respecté leurs engagement­s. Tiens, tiens, il y a donc eu des abus.

PEGASUS ESPIONNAIT JAMAL KHASHOGGI AVANT SA MORT

NSO Group a également nié que sa technologi­e ait été associée de quelque manière que ce soit au meurtre du chroniqueu­r saoudien dissident Jamal Khashoggi. Le rapport du consortium établit pourtant qu’immédiatem­ent après le meurtre, les autorités saoudienne­s ont ciblé l’entourage de Khashoggi, dont sa future femme. Son téléphone était contaminé par Pegasus.

Étrangemen­t, le rapport de « Forbidden Stories » ne parle pas d’Omar Abdulazziz, un proche de Khashoggi établi au Québec. Peutêtre une révélation à venir. Abdulaziz est une personnali­té arabe très en vue sur sa chaîne YouTube, où il diffuse des critiques virulentes contre la monarchie saoudienne.

Il est convaincu que ce sont ses conversati­ons avec Khashoggi qui ont entraîné sa mort. Les services secrets saoudiens étaient à l’écoute. Le laboratoir­e de sécurité informatiq­ue Citizen Lab, de l’université de Toronto, avait découvert l’infiltrati­on.

En 2020, un juge israélien a rejeté une tentative du NSO Group de faire annuler la poursuite qu’Omar Abdulazziz lui a intentée pour le piratage de son téléphone à Sherbrooke.

La poursuite affirme que les communicat­ions intercepté­es entre lui et Khashoggi – y compris les discussion­s sur la façon de faire pression pour un changement démocratiq­ue en Arabie saoudite – ont été cruciales dans la décision de tuer Khashoggi.

Le NSO Group a immédiatem­ent réagi en affirmant que le rapport était « plein d’hypothèses erronées et de théories non corroborée­s ».

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