Le Journal de Montreal

MAISON DE 3 MILLIONS À DÉMOLIR

Après une saga judiciaire de 8 ans (qui n’est peut-être pas finie), la Cour supérieure ordonne la démolition de cette résidence de Gatineau.

- JADRINO HUOT

GATINEAU | Un juge a ordonné la démolition d’une luxueuse maison évaluée à 3 millions $, aux frais de la Ville de Gatineau, en raison d’une erreur de son service d’urbanisme qui avait permis sa constructi­on trop près de la rue.

Le juge Michel Déziel de la Cour supérieure a rendu mardi cette décision en lien avec une saga qui perdure depuis septembre 2013.

L’affaire a tellement fait couler d’encre qu’on en parle localement comme du dossier « 79, Fraser », qui correspond à l’adresse de la demeure dans le secteur Aylmer.

Selon le document de cour, celleci est évaluée à près de 3 millions $.

L’année 2013 devait être une année de rêve pour Patrick Molla et sa famille.

Début mai, la Ville de Gatineau lui a délivré un permis de constructi­on, si bien que sa future maison a commencé à prendre forme à la fin du mois sur un terrain qui était vacant depuis plus de 20 ans.

Le 19 septembre de la même année, les responsabl­es du service d’urbanisme de la Ville ont toutefois constaté que le permis a été accordé en violation des règlements municipaux applicable­s.

La distance entre la maison et la rue, qui doit être de 15 à 16,3 mètres, n’est que de sept mètres.

Le comité consultati­f d’urbanisme a dès lors recommandé au conseil municipal d’accepter une demande de dérogation mineure, demande qui a été entérinée le 8 juillet 2014.

Entre-temps, la constructi­on s’est poursuivie et la famille a emménagé dans sa nouvelle demeure en février 2014.

VOISINS MÉCONTENTS

Quelques mois plus tard, les voisins immédiats, Robert Blain et Manon Pelletier, d’un côté, ainsi que David Stinson et Cheryl Lyttle, de l’autre, ont intenté un recours contre la Ville de Gatineau et Patrick Molla, sous prétexte qu’ils subissaien­t un préjudice quotidien vu les dimensions et le positionne­ment de la résidence.

Ils alléguaien­t que la Ville avait commis un abus de pouvoir en adoptant la dérogation mineure, ce qui constituai­t, selon eux, un changement de zonage déguisé.

« Je vois cette décision [concernant la démolition] comme une victoire, je suis très contente », a réagi hier Manon Pelletier, dont le mari est décédé en septembre 2020 avant la fin des procédures.

« C’était un dossier complexe, tant sur le plan factuel que juridique. Le cheminemen­t a parfois été houleux, ce pour quoi le mérite revient à mes clients qui ont démontré beaucoup de courage en ne cédant pas à la pression populaire », a renchéri l’avocat du groupe de voisins, Me Sébastien Gélineau.

CE N’EST PAS FINI...

Dans ce dossier, la Ville de Gatineau n’est pas au bout de ses peines, car le propriétai­re des lieux, Patrick Molla, lui réclame des dommages compensato­ires et punitifs de 3,6 millions $.

Le tourbillon judiciaire, médiatique et politique entourant sa maison a sapé la quiétude et la tranquilli­té d’esprit de sa famille, a-t-il déploré.

« Mon client n’a jamais voulu construire une maison dérogatoir­e. Peu importe ce qui allait arriver, il en sortait perdant », nous a dit son avocat, Me Éric Oliver.

La Ville de Gatineau a maintenant 30 jours pour en appeler du verdict. Par courriel, elle nous a répondu que ses services juridiques analysaien­t toujours la décision.

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 ?? PHOTOS AGENCE QMI, JADRINO HUOT ?? La luxueuse maison du « 79, Fraser », qui devra être démolie en raison de sa proximité avec la voie publique. En mortaise, les voisins immédiats prétendaie­nt subir un préjudice quotidien vu les dimensions et le positionne­ment de la résidence contestée.
PHOTOS AGENCE QMI, JADRINO HUOT La luxueuse maison du « 79, Fraser », qui devra être démolie en raison de sa proximité avec la voie publique. En mortaise, les voisins immédiats prétendaie­nt subir un préjudice quotidien vu les dimensions et le positionne­ment de la résidence contestée.
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