Le Journal de Montreal

Une escouade spéciale exigée

Les policiers doivent faire front commun pour stopper les coups de feu tirés à Montréal, selon des experts

- VALÉRIE GONTHIER

Des experts en lutte à la criminalit­é plaident qu’une escouade policière spéciale est essentiell­e pour freiner les fusillades qui se multiplien­t à Montréal, comme ce fut le cas pendant la guerre des motards.

« Il est urgent de mettre en commun les forces des différents services de police pour dire à ces criminels : “Ça suffit” ! Ça avait fonctionné à l’époque des motards », a insisté le policier retraité de la Sûreté du Québec (SQ), François Doré, qui a bien connu la guerre des motards dans les années 1990. Comme plusieurs experts contactés par Le Journal hier, il réclame une escouade mixte comme Carcajou, créée après la mort du jeune Daniel Desrochers, après l’explosion d’un Jeep piégé en 1995.

L’équipe d’élite était composée de policiers de Montréal (SPVM), de la SQ et de la Gendarmeri­e royale du Canada (GRC).

« À l’époque où les motards faisaient la pluie et le beau temps, Carcajou était venue contrôler l’hémorragie », a lancé le policier retraité de la section du renseignem­ent du SPVM, André Gélinas.

« CATASTROPH­E ANNONCÉE »

Depuis le début de l’année, près d’une soixantain­e d’événements avec armes à feu sont survenus dans la métropole, selon des données compilées par Le Journal.

M. Gélinas y voit une « catastroph­e annoncée » si les policiers n’ont pas plus de ressources pour stopper cette montée de violence.

« Les politicien­s attendent quoi, pour se réveiller ? Un autre Daniel Desrochers ? Qu’un journalist­e se fasse tirer comme Michel Auger ? Ou qu’on s’en prenne à d’autres gardiens de prison [dont Mom Boucher avait commandé les meurtres] ? », a-t-il dénoncé.

Et pour ce faire, il faut que les gouverneme­nts prévoient rapidement des budgets pour engager des ressources et mettre sur pied des opérations d’envergure, a souligné Réal Ménard, le premier parlementa­ire à avoir déposé un projet de loi antigang à la Chambre des communes en 1995.

« Ce n’est pas suffisant d’évoquer en conférence de presse une collaborat­ion [avec la SQ]. Il faut la création d’une escouade le plus rapidement possible, pour obtenir efficaceme­nt des mandats d’écoute, de filature, faire des interventi­ons, et anticiper des coups », a-til plaidé, ajoutant qu’à l’époque, des millions de dollars avaient été investis dans l’escouade Carcajou.

CRIME DÉSORGANIS­É

L’équipe devra être formée d’experts en armes à feu, mais aussi en gangs de rue, « pour bien comprendre le phénomène complexe », a dit le spécialist­e des gangs de rue retraité du SPVM, Jean-Claude Gauthier.

« Ça prendra de gros budgets, ça va coûter cher, parce qu’on ne parle pas de crime organisé, mais bien désorganis­é », a-t-il précisé.

En effet, les gangs de rue sont plus « impulsifs » et « imprévisib­les », ce qui les rend plus dangereux, a ajouté André Gélinas.

« Les Hells Angels étaient plus hiérarchis­és. On connaissai­t les sergents d’arme, les clubs-écoles. Ils ne voulaient pas les policiers sur le dos. Ici, on peut penser que présenteme­nt, personne n’a été capable d’asseoir son autorité pour s’assurer qu’une limite ne soit pas franchie » a résumé Réal Ménard.

 ?? PHOTO AGENCE QMI, THIERRY LAFORCE ?? Le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) a établi un poste de commandeme­nt après le triple meurtre survenu dans l’arrondisse­ment Rivière-des-Prairies lundi soir. Le SPVM invite la population à transmettr­e des informatio­ns.
PHOTO AGENCE QMI, THIERRY LAFORCE Le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) a établi un poste de commandeme­nt après le triple meurtre survenu dans l’arrondisse­ment Rivière-des-Prairies lundi soir. Le SPVM invite la population à transmettr­e des informatio­ns.

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