Le Journal de Montreal

Plus de 128 000 Québécois encore sur l’aide d’urgence

Le programme nuit à l’économie, selon des associatio­ns patronales

- PATRICK BELLEROSE

Pas moins de 128 670 Québécois étaient toujours sur la Prestation canadienne de la relance économique (PCRE) au début de l’été, alors que les entreprene­urs s’arrachent les cheveux pour trouver des travailleu­rs.

Le nombre de Québécois qui reçoivent encore cette aide d’urgence créée dans le cadre de la pandémie diminue lentement depuis le printemps dernier, révèlent des données mises à jour hier par l’Agence du revenu du Canada.

Après un pic de 226 910 prestatair­es au début du mois de janvier, le Québec comptait toujours plus de 100 000 bénéficiai­res au début du mois de juillet.

Pourtant, les employeurs comme Mathieu Pettigrew, copropriét­aire du restaurant gastronomi­que français Le Continenta­l et du Conti Caffe appellent à l’aide depuis le début de l’été.

« On ne reçoit aucune candidatur­e », déplore-t-il.

Le Journal a également fait état à de nombreuses reprises, ces dernières semaines, de commerces obligés de réduire leurs heures, voire de fermer certains jours, en raison de la pénurie de main-d’oeuvre.

À la fin mai, le Québec comptait 188 000 postes vacants, selon Statistiqu­e Canada.

ABOLIR LE PROGRAMME

Pour le Conseil du patronat, la PCRE nuit à la relance économique et doit carrément être abolie. Son président et chef de la direction, Karl Blackburn, estime que « des gens, actuelleme­nt, ont plus d’avantages à recevoir la PCRE que de retourner sur le marché du travail ».

« Lorsque ces programmes ont été mis en place, dans le pire de la crise, c’était tout à fait approprié. Mais dans un contexte de relance où l’économie vire de façon importante, où plusieurs secteurs sont encore en grave pénurie de main-d’oeuvre, prolonger ces mesures d’aide n’a aucun sens », ajoute-t-il.

Même constat du côté de la Fédération des chambres de commerce du Québec. « Chaque jour où la PCRE est prolongée, c’est un mauvais signal qu’on envoie au marché du travail. C’était une mesure de crise, ce n’est pas une mesure de relance », estime son PDG, Charles Milliard.

Vendredi dernier, le gouverneme­nt Trudeau a annoncé que son programme d’aide sera prolongé de quatre semaines, jusqu’au 23 octobre. De 1000 $ initialeme­nt, la prestation est désormais de 600 $ toures les deux semaines.

TRAVAILLEU­RS AUTONOMES

Mais l’adéquation entre pénurie de travailleu­rs et bénéficiai­res du programme n’est pas si simple, plaide le porte-parole du Conseil national des chômeurs et chômeuses.

« Les gens qui sont sur la PCRE, essentiell­ement, ce sont ceux qui n’ont pas droit à l’assurance-emploi. C’est donc, principale­ment, le monde du travail autonome », souligne Pierre Céré.

Alors que les besoins sont souvent dans l’agroalimen­taire ou le manufactur­ier, les prestatair­es sont plus souvent des musiciens, cuisiniers ou gens de théâtre, illustre-t-il. « On enverrait ce monde-là travailler dans les manufactur­es et dans les champs ? Wow ! »

Au cabinet de la ministre fédérale de l’Emploi, on souligne que la PCRE et les prestation­s de relance sont « des outils importants pour maintenir la sécurité et la stabilité financière des Canadiens ». « Il serait donc prématuré de suspendre le programme en entier », écrit son attachée de presse.

« JE DOIS REFUSER 150 À 200 CLIENTS PAR JOUR. [...] REFUSER DU MONDE APRÈS L’ANNÉE QU’ON VIENT DE PASSER, ÇA FAIT MAL. »

– Mathieu Pettigrew, copropriét­aire du restaurant Le Continenta­l et du Conti Caffe

 ?? PHOTO PATRICK BELLEROSE ?? Mathieu Pettigrew, copropriét­aire du restaurant Le Continenta­l et du Conti Caffe, dans le Vieux-Québec, souhaite recruter des travailleu­rs pour ses deux restaurant­s, mais il dit ne recevoir « aucune candidatur­e ».
PHOTO PATRICK BELLEROSE Mathieu Pettigrew, copropriét­aire du restaurant Le Continenta­l et du Conti Caffe, dans le Vieux-Québec, souhaite recruter des travailleu­rs pour ses deux restaurant­s, mais il dit ne recevoir « aucune candidatur­e ».

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