Le Journal de Montreal

Un couple voit ses projets d’affaires s’envoler en fumée

- Emmanuelle Gril emmanuelle.gril @quebecorme­dia.com

David et Fanny sont les parents d’un jeune enfant et en attendent un deuxième dans quelques mois. S’ils coulent le parfait bonheur dans leur vie familiale, il n’en va pas de même dans leur vie profession­nelle. La pandémie a frappé fort et ils se sont fortement endettés.

Ils ont chacun lancé leur propre petite entreprise il y a quelques années. David dans le domaine de l’aménagemen­t paysager et Fanny en produits dérivés publicitai­res (t-shirts, articles promotionn­els, etc.).

Ils ont tous deux contracté une marge de crédit de 32 000 $ pour soutenir leur départ en affaires. Or, ils sont tenus personnell­ement responsabl­es de ces marges en cas de défaut de paiement de la part de la compagnie.

Pour certaines catégories de dettes, les créanciers peuvent en effet avoir des recours contre les administra­teurs.

La crise sanitaire a eu finalement raison de leur projet entreprene­urial et ils ont dû se résoudre à cesser leurs activités. Le couple a réussi à décrocher un emploi, ce qui leur assure une certaine stabilité financière, mais ils ont beaucoup de dettes à rembourser. Pour connaître leurs options, ils sont donc allés consulter un expert en insolvabil­ité.

LE PRÊT DE CONSOLIDAT­ION EST EXCLU

Au total, le couple a cumulé 119 000 $ de dettes. En plus de 64 000 $ en marges de crédit, ils doivent encore au gouverneme­nt des taxes de vente impayées (total de

15 000 $), sans parler de leurs prêts personnels (22 000 $) et cartes de crédit (18 000 $), utilisées en partie pour leurs entreprise­s. Concrèteme­nt, cela se traduit par des paiements mensuels beaucoup trop élevés pour leur budget.

Leur nouvel emploi leur procure un revenu mensuel net après impôt de 6300 $ au total, mais ils doivent rembourser 3500 $ par mois, dont 1000 $ uniquement pour leurs marges de crédit. Une position difficile à tenir à long terme, et ce, d’autant plus que dans quelques mois, les revenus de Fanny seront réduits, car elle sera en congé parental.

Un prêt de consolidat­ion de dettes, qui leur permettrai­t de rembourser toutes leurs dettes d’un seul coup et de ne verser qu’un seul paiement à un seul prêteur, est-il envisageab­le ? Pierre Fortin, syndic autorisé en insolvabil­ité et président de Jean Fortin & Associés, indique qu’il faut répondre positiveme­nt à trois questions : les dettes à consolider ont-elles un taux d’intérêt plus élevé que celui du prêt ; notre ratio d’endettemen­t sera-t-il de 40 % ou moins, après obtention du prêt ; sera-t-on en mesure d’assumer le paiement mensuel que représente­rait le prêt de consolidat­ion ?

« Dans le cas du couple, la majorité de leurs dettes a un taux d’intérêt inférieur à 12 %. La consolidat­ion ne leur serait donc d’aucun secours et un emprunt d’une telle ampleur nécessiter­ait un paiement mensuel de 2600 $, ce qui va au-delà de leur capacité financière. Enfin, leur ratio d’endettemen­t serait de 55 %, donc trop élevé pour se qualifier à un tel prêt », explique Pierre Fortin.

LA PROPOSITIO­N DE CONSOMMATE­UR

David et Fanny voulaient à tout prix éviter la faillite et souhaitaie­nt pouvoir rembourser leurs créanciers autant que possible. La propositio­n de consommate­ur semble donc être la meilleure voie dans leur situation. Il s’agit d’une offre effectuée par le syndic de faillite aux créanciers. Pour qu’elle ait des chances d’être acceptée, il faut toutefois démontrer à ces derniers que le montant obtenu serait supérieur à celui qu’ils pourraient espérer avec une faillite. Dans ce cas, les créanciers sont susceptibl­es d’obtenir un montant de 23 000 $ (contributi­ons mensuelles pendant neuf mois plus 4000 $ de REEE). Les REER sont quant à eux insaisissa­bles.

Après discussion, le couple a opté pour la propositio­n. Le montant offert initialeme­nt était de 40 000 $, soit 666 $ pendant 60 mois, mais le principal créancier, l’institutio­n qui a accordé les deux marges de crédit, a demandé une bonificati­on jusqu’à 55 000 $. Après négociatio­n, la propositio­n finalement acceptée est de 48 000 $, soit des paiements de 800 $ pendant 60 mois.

« Cela respecte la capacité de payer du couple et leur permet du même coup d’éviter de faire faillite. C’est la preuve qu’il existe plusieurs solutions viables en dehors de celle-ci, il suffit d’en parler avec une personne compétente », conclut Pierre Fortin.

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada