Et si les vieux travaillaient plus ?
Les Québécois de 55 ans et plus traînent de la patte comparés au reste de l’OCDE
On ne cesse d’entendre qu’il manque de travailleurs au Québec. Et si une partie de la solution passait par nos travailleurs plus âgés ?
« Les Québécois travaillent beaucoup plus qu’ailleurs. Sauf ceux entre 55 et 70 ans », assène Jean-François Bertholet, un spécialiste du monde du travail qui enseigne à HEC Montréal.
Quand en 2006 Lucien Bouchard y est allé de sa célèbre boutade comme quoi les Québécois ne travaillent pas assez, « il parlait peut-être de sa propre génération », s’amuse celui qui est aussi conférencier, chercheur et auteur.
Cet universitaire féru des chiffres n’est pas seul à dire ça. Desjardins constate la même chose dans un rapport du 7 septembre.
« Une des raisons, c’est qu’il y a plus de gens qui travaillent pour l’État au Québec et qui ont droit à des pensions de qualité », indique l’économiste principale de l’institution, Joëlle Noreau.
Les chiffres ne mentent pas. Le ministre de l’Économie du Québec – pas exactement une prime jeunesse – le sait aussi.
Pas plus tard que le 4 septembre, Pierre Fitzgibbon a déclaré au Journal que « les 55 à 70 ans au Québec travaillent moins qu’en Ontario ».
QUÉBEC VS ONTARIO
Les Canadiens âgés traînent de la patte, confirment les données les plus récentes de l’OCDE. Au Japon, 77 % des 55 à 64 ans travaillent. Ils sont 62,3 % au Canada. Nos vieux sont aussi loin derrière les Allemands (71,6 %) et les Suédois (76,3 %).
« Ce n’est certainement pas sur les jeunes qu’on devrait taper présentement », pense Jean-François Bertholet.
Au Canada, 53,3 % des 15 à 24 ans travaillent. Ils sont 47 % en Allemagne, 46 % au Japon et 38 % en Suède.
Quant à la comparaison entre le Québec et l’Ontario, il est vrai que les personnes âgées travaillent plus là-bas qu’ici. La différence la plus marquée est dans la tranche des 60 à 64 ans : 51,5 % au Québec contre 57,4 % en Ontario.
TRAVAILLER POUR LE FUN
Robert Mercier, lui, n’a pas attendu l’appel du ministre Fitzgibbon pour se lancer. Celui que tout le monde surnomme Ti-Bob est camionneur, sa deuxième carrière.
L’homme de 76 ans est derrière le volant depuis 20 ans, après une carrière de 39 ans comme patrouilleur dans le service de police de Saint-Basile-le-Grand, aujourd’hui la Régie intermunicipale de police Richelieu–Saint-Laurent.
« Ça n’arrête pas de bien aller, je m’amuse comme un petit fou », lance le sympathique septuagénaire.
Au moment de notre conversation, il est en direction de Niagara Falls pour un voyage de 690 kilomètres. « Je pourrais arrêter, mais qu’est-ce que tu veux que je fasse ? » lâche-t-il en riant.
TANT QUE LA SANTÉ LE PERMET
Installé à McMasterville, en Montérégie, il possède un triplex, en plus de toucher sa pension de policier. « Je n’ai pas besoin d’argent. Je travaille pour le fun », reconnaît Ti-Bob.
Tant que sa santé le lui permettra, il va continuer. « J’ai lâché la bouteille il y a 20 ans. Je me tiens en forme. Je fais attention », assure-t-il.
Après 5 ans à sillonner l’Ouest canadien et les États-Unis, il a toutefois réduit la taille de ses routes, récemment.
« Des fois, je fais une sieste de 20 minutes, et ça me repart ben dur », confie Robert.
Il compte rouler encore longtemps. De quoi faire rêver le ministre Fitzgibbon.
« ÇA N’ARRÊTE PAS DE BIEN ALLER, JE M’AMUSE COMME UN PETIT FOU ! » – Robert Mercier, 76 ans, camionneur