Rendez-vous manqué
L’abandon du projet de loi pour la réforme du mode de scrutin risque, pour François Legault, de s’avérer le rendez-vous manqué avec l’histoire.
Pourtant, c’est le rêve des grandes personnalités politiques de passer à l’histoire. Elles veulent qu’on se souvienne de leur héritage laissé aux générations futures.
Pour le chef d’un parti qui porte le nom de Coalition Avenir Québec, les ambitions sont plutôt à court terme et loin de refléter un homme politique visionnaire.
Le premier ministre trône dans les sondages et l’impact d’une réforme sur sa députation se révélerait peu signifiant si la tendance actuelle se maintenait.
Il ne veut toutefois pas prendre de risques. Il préfère maintenir un mode de scrutin archaïque qui génère des distorsions entre le vote populaire et la composition de l’Assemblée nationale.
Il veut gouverner sans compromis ! Faut-il se surprendre dans ce contexte des débats acrimonieux à l’Assemblée nationale ?
L’HÉRITAGE
À la décharge de notre premier ministre, il faut cependant dire que ses prédécesseurs des deux dernières décennies n’ont pas laissé de grands legs derrière eux.
On est rendus à ressasser les contributions des Duplessis, Lesage, Johnson, Bourassa et Lévesque au développement du Québec.
L’obstination va bon train sur Maurice Duplessis. Certains prétendent que ce fut une période de grande noirceur pour le Québec. D’autres, au contraire, saluent son autonomisme.
Le Maître chez nous de Jean Lesage résonnera encore longtemps. L’égalité de Daniel Johnson a fait mouche en son temps. Le développement hydroélectrique de Robert Bourassa caractérisera son passage comme chef d’État.
Le désir d’un pays de René Lévesque a cultivé une fierté que les Québécois peinaient à afficher.
Malheureusement, peu à peu, les politiciens se sont transformés en gérants de succursales et la politique est devenue plus un emploi qu’un devoir de représentativité.
Ils se sont affairés à gérer l’État comme un magasin, tout en s’assurant de bien soigner leur image pour être réélus.
RECUL INADMISSIBLE
Selon ce qui a été rapporté dans les médias, la députation caquiste aurait pesé lourdement dans la décision du premier ministre.
Rien de surprenant de la part de personnes dont la fonction de député est considérée comme un emploi qu’ils ne veulent pas perdre.
Il est désolant de constater que des intérêts personnels aient pris le dessus sur le sens de l’honneur et le bien commun. Monsieur Legault avait signé un pacte pour modifier le mode de scrutin et il renie sa propre parole.
Le Québec nécessite un plus grand consensus social dans la foulée des défis posés par l’environnement, à commencer par la pandémie et ses conséquences socioéconomiques.
Le combat contre le réchauffement climatique nécessitera également qu’on serre les rangs.
Un mode de scrutin proportionnel mixte infuserait une bonne dose de collaboration entre les acteurs politiques et favoriserait l’émergence de projets structurants pour un plus large segment de la population.
Il appartient à François Legault de faire l’histoire ou d’en être un produit qui sera vite oublié !