Le Journal de Montreal

Un élu suspendu 100 jours s’en tire à très bon compte

Le conseiller de Bolton-Est ne purge que le tiers du temps à cause d’une faille légale

- JEAN-LUC LAVALLÉE Bureau d’enquête

Condamné à 100 jours de suspension pour des entorses à l’éthique, un conseiller municipal de Bolton-Est ne purgera que le tiers de sa peine et pourrait siéger à nouveau dans un mois, s’il est réélu, en raison d’une faille dans la loi.

Alain Déry, conseiller à Bolton-Est, en Estrie, s’en tire à bon compte et sera probableme­nt l’un des derniers élus municipaux, sinon le dernier, à profiter d’une faille dans la Loi sur l’éthique et la déontologi­e en matière municipale.

À l’heure actuelle, les suspension­s sans salaire imposées par la Commission municipale du Québec (CMQ) ne peuvent s’étaler sur deux mandats consécutif­s. Autrement dit, le compteur est remis à zéro au début de chaque mandat, même si une suspension n’est pas terminée.

Quand il sera adopté, le projet de loi 49 – dont l’étude est complétée – colmatera cette brèche et permettra dorénavant aux juges administra­tifs d’imposer des suspension­s en fin de mandat qui devront être purgées au complet, dans le mandat suivant.

À Bolton-Est, M. Déry a plaidé coupable à cinq chefs d’accusation. Il a reconnu avoir participé aux délibérati­ons du conseil et d’avoir voté sur des résolution­s qui impliquaie­nt l’organisme à but non lucratif qu’il préside, Le Rucher Boltonnois, sans déclarer son intérêt.

À titre de créancier de son propre organisme, le conseiller municipal était notamment en conflit d’intérêts lors de l’acquisitio­n du garage municipal.

L’achat, d’une somme de 285 200 $, a été financé par une société que M. Déry présidait aussi (Financemen­t 2616) et à qui il avait prêté 100 000 $.

SUSPENSION ET REMBOURSEM­ENT

En plus de sa suspension de 100 jours, la CMQ lui a ordonné de régularise­r sa situation au plus tard le 30 octobre en coupant tous ses liens financiers directs ou indirects avec le Rucher Boltonnois et Financemen­t 2616.

M. Déry a également dû rembourser les intérêts perçus qui s’élèvent à environ 375 $.

En entrevue, M. Déry ne s’est pas défilé. Il a reconnu avoir posé les gestes reprochés, mais il a plaidé la bonne foi. Retraité, il dit agir bénévoleme­nt au sein de son organisme qui promeut l’apiculture communauta­ire et les producteur­s locaux avec le marché public et le bistro qu’il opère, afin de « dynamiser la communauté ».

« Les moments où j’aurais dû sortir des débats du conseil, je n’en avais pas

conscience parce que, pour moi [Le Rucher

Boltonnois] était une personne morale qui était un OBNL, ce n’était pas moi personnell­ement qui étais impliqué […] J’ai la conscience tranquille avec tout ça. Je n’ai pas le sentiment d’avoir trompé qui que soit. »

Dans sa décision, le tribunal a souligné que l’élu est « très impliqué socialemen­t dans sa communauté » et qu’il « n’a pas agi dans un but intéressé afin d’obtenir des avantages financiers ».

 ?? PHOTOS AGENCE QMI, MICHEL SAINT-JEAN ?? Alain Déry se présente à nouveau aux élections du 7 novembre pour un poste de conseiller municipal à Bolton-Est. En mortaise, l’ancien garage municipal acheté par l’organisme qu’il préside, Le Rucher Boltonnois.
PHOTOS AGENCE QMI, MICHEL SAINT-JEAN Alain Déry se présente à nouveau aux élections du 7 novembre pour un poste de conseiller municipal à Bolton-Est. En mortaise, l’ancien garage municipal acheté par l’organisme qu’il préside, Le Rucher Boltonnois.

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