Des jobs pour combattre le banditisme
Un intervenant communautaire veut une intégration professionnelle pour sortir les jeunes des gangs de rue
À l’intérieur de Montréal, le journaliste Louis-Philippe Messier se déplace surtout à la course, son bureau dans son sac à dos, à l’affût de sujets et de gens fascinants. Il parle à tout le monde et s’intéresse à tous les milieux dans cette chronique urbaine. Sur fond de crise sanitaire et de fusillades à répétition, un déclic s’est produit cet hiver dans l’esprit de l’intervenant Pierreson Vaval.
Lui qui se consacre depuis 25 ans à prévenir la délinquance chez les jeunes de Rivière-des-Prairies (RDP) grâce aux sports et aux loisirs, il a résolu de proposer aussi des « activités » à une clientèle encore plus en détresse… celle des bandits eux-mêmes, ceux qui s’entretuent, même si ce ne sont plus des mineurs.
« Là où la population voit des criminels dangereux, moi, qui ai vu ces gars-là grandir, je vois des jeunes que je n’ai pas su aider, que j’ai perdus de vue et que je ne veux plus abandonner désormais », m’explique celui qui est l’un des fondateurs de l’organisme communautaire Équipe RDP.
Qualifier M. Vaval de passionné serait un euphémisme. Il m’a donné rendez-vous au parc Armand-Bombardier, sur le premier terrain de basketball municipal construit à RDP dans les années 1990 et que son organisme a contribué à embellir récemment par une oeuvre d’art qui occupe tout le terrain.
Des jeunes des HLM Marie-Victorin viennent y jouer après l’école. Un chalet de parc en construction à côté montre que la Ville investit ici. « Avant, il n’y avait même pas de toilettes dans le parc ! »
Pour illustrer le sous-développement des infrastructures de loisirs à RDP, M. Vaval m’apprend qu’il n’y a pas dans son quartier de « centre des loisirs » à proprement parler.
S’OCCUPER DES PLUS VIEUX
Certains ex-protégés de M. Vaval devenus adultes et qui ont mal viré lui faisaient des reproches éloquents.
« Il y en a qui me disaient : Pierreson, tu fais des choses pour les petits, mais tu ne fais rien pour nous. Et là, j’ai compris que ces jeunes-là, je n’ai plus le droit de les laisser à eux-mêmes. Va falloir que j’arrête de penser juste aux ados et aux enfants et que j’offre des portes de sortie honorables aux jeunes des gangs. »
En collaboration avec la FTQConstruction et le Local 9 (menuiserie), M. Vaval et son équipe proposent un programme d’initiation rapide aux métiers de la construction.
« Ça existe depuis environ trois mois et déjà une soixantaine de jeunes y participent », s’enthousiasme M. Vaval.
« Treize ou 14 participants ont terminé et ont déjà un emploi, de bonnes jobs. Une centaine attendent leur tour. On travaille à d’autres programmes dans d’autres corps de métier de la construction. »
Des candidats sont même morts cet été avant de pouvoir commencer ce programme qui les aurait peut-être sauvés.
MAISON DES MOINS JEUNES
M. Vaval travaille aussi à l’ouverture d’un nouveau local destiné aux jeunes adultes qui veulent parler, confier leurs problèmes et se faire proposer des voies d’avenir.
« Quand je leur parle dehors, ils ont toujours peur que quelqu’un les attaque par surprise, alors je veux leur fournir un lieu sécuritaire », me dit-il.
Bref, il veut faire une maison des jeunes pour les moins jeunes… souvent des pères de famille qui cherchent des moyens de vivre autrement que par la violence.
J’espère que, dans les partis municipaux en élection en ce moment, quelqu’un prête attention à cet enjeu. Si on offre des solutions de reconversion à de jeunes criminels, apparemment, ils tendent l’oreille.