Le Journal de Montreal

L’armure de François Legault tient bon

- JOSÉE LEGAULT Blogueuse au Journal Politologu­e, auteure, chroniqueu­se politique

Le 3 octobre 2022, à moins d’un réaligneme­nt spectacula­ire des planètes politiques, François Legault récoltera son deuxième mandat majoritair­e. Il dit même penser à un possible troisième mandat pour 2026.

Va toujours pour 2022, mais qui sait dans quelle dynamique le Québec se trouvera vraiment dans cinq ans ?

Derrière l’image bien huilée d’un premier ministre à l’armure invincible, se trouve néanmoins un chef de parti qui, malgré son taux de popularité stratosphé­rique, s’apprête à guerroyer dur d’ici le prochain scrutin.

Le 19 octobre, il prorogera la session parlementa­ire. Objectif : livrer un discours d’ouverture visant à redéfinir les priorités de son gouverneme­nt loin des sentiers pénibles de la crise sanitaire.

La pandémie s’étirant néanmoins pendant que son très solide ministre Christian Dubé commence à peine à redresser un réseau de la santé gravement dysfonctio­nnel depuis des années, l’exercice s’annonce délicat.

Passionné d’économie, c’est toutefois sur sa gestion de la pandémie et sur le terrain payant du nationalis­me identitair­e que François Legault se voit encore récompensé dans les sondages.

Selon le dernier sondage Léger/TVA

Le Journal, la CAQ trône toujours au sommet. Portée au pouvoir en 2018 avec 37 % des voix, la CAQ rafle maintenant 54 % d’appuis chez les francophon­es.

BÉTON ARMÉ

Pour les partis d’opposition, l’éclipse est totale. À 10 % chez les francophon­es, le PLQ de Dominique Anglade croupit impuissant au 36e dessous. Plus le temps passe, plus le téflon de François Legault prend des airs de béton armé.

Ses électeurs ne lui tiennent rigueur de rien. Ils ont boudé les conservate­urs au fédéral, mais ne lui en veulent pas de les avoir appuyés.

Ils sont nombreux à reconnaîtr­e le racisme systémique, mais ne bronchent pas de l’entendre s’y opposer. Idem pour

le projet de loi 96 modernisan­t la loi 101, mais vu comme trop timide par plusieurs experts.

Au lieu de s’étioler, la lune de miel entre M. Legault et une majorité de francophon­es se solidifie. Un tel phénomène témoigne de la force inouïe du rapport de confiance liant la moitié de la population au premier ministre.

Pour les péquistes, solidaires et libéraux, ne reste plus qu’à monter les marches de l’Oratoire à genoux…

En vue des élections, M. Legault semble néanmoins avoir trouvé son « principal » adversaire : Gabriel Nadeau-Dubois, le nouveau chef parlementa­ire de Québec solidaire.

POLARISATI­ON CLIENTÉLIS­TE

Esprit brillant et orateur aguerri par le Printemps érable, il est vrai que GND croise le fer avec le premier ministre avec une agilité nettement supérieure à celle de ses vis-à-vis du PLQ et du PQ.

Lorsqu’il a comparé M. Legault à Maurice Duplessis, il a fait mouche auprès de ses troupes. Traitant GND de woke en réaction, M. Legault a fait de même pour les siennes.

Sur le fond des choses, le spectacle était cependant peu édifiant. Des deux côtés, l’opération sentait la polarisati­on clientélis­te à plein nez. Habile tacticien, François Legault s’assure surtout d’identifier un adversaire qu’il sait aucunement menaçant.

Malgré les indéniable­s talents de GND, QS n’oppose aucun danger au gouverneme­nt sortant.

En comparaiso­n, dès sa première élection en 1970, le PQ récoltait 23 % des voix. Idem pour la CAQ, qui, dès 2012, en récoltait 27 %. Plus de dix ans déjà après sa création, QS compte à peine 11 % d’appuis.

Dans l’imaginaire médiatique, le combat Legault-Nadeau n’en est pas moins né. Reste à voir si l’illusion tiendra le coup jusqu’en 2022.

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Habile tacticien, François Legault s’est assuré d’identifier un adversaire qu’il sait aucunement menaçant.

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