Port-au-Prince sous l’emprise des gangs
Près de trois millions d’habitants vivent dans la peur
PORT-AU-PRINCE | (AFP) Longtemps cantonnés aux bidonvilles, les gangs ont graduellement étendu leur contrôle en Haïti et les près de trois millions d’habitants de Port-au-Prince se voient contraints d’adapter leur quotidien à cette réalité, de peur d’être la prochaine victime.
« Les gangs aujourd’hui règnent en maîtres et seigneurs sur le pays », déplore Gédéon Jean, directeur du Centre d’analyse et de recherche en droits de l’homme, basé dans la capitale haïtienne.
L’organisation relève une augmentation alarmante des cas d’enlèvements en Haïti : plus de 600 cas ont été recensés sur les trois premiers trimestres de 2021 contre 231 à la même période en 2020.
L’enlèvement de pasteurs ou de fidèles en octobre, parfois en plein milieu de
messes dominicales, par des membres de gangs agissant parfois à visage découvert, a montré qu’aucun lieu n’était épargné.
« Aucun endroit n’est sûr : n’importe quoi peut arriver n’importe où », résume Daphné Bourgoin.
FUIR SON LOGEMENT
Début juin, le quartier défavorisé de Martissant s’est vidé de ses habitants quand plusieurs gangs ont cherché à en prendre le contrôle par les armes. Le secteur est en effet stratégique, car traversé par la seule route d’accès à la moitié sud d’Haïti. Même l’organisation Médecins sans frontières, établie depuis 2006 à Martissant, s’est résolue à déplacer son centre d’urgences à Port-au-Prince, compliquant l’accès aux soins.
« On a discuté avec les leaders communautaires sur place et on a compris que la sécurité de nos équipes n’était plus garantie », regrette Désiré Kimanuka, chef de projet de l’ONG. Les affrontements se sont étendus à d’autres quartiers pauvres de la capitale et, au cours de l’été, plus de 19 000 personnes comptant déjà parmi les plus vulnérables du pays ont dû fuir leurs logements pour se réfugier dans des gymnases ou des lieux publics, selon l’ONU.