Le Journal de Montreal

Des étudiants pas assez formés

La formation collégiale « pas suffisante » met la population à risque, dit l’Ordre, qui veut imposer un baccalauré­at

- HÉLOÏSE ARCHAMBAUL­T Le gouverneme­nt a récemment refusé d’imposer une formation universita­ire obligatoir­e aux infirmière­s.

La formation collégiale en inhalothér­apie au Québec est à ce point insuffisan­te qu’elle met la population à risque, dénonce leur ordre profession­nel, qui veut imposer un diplôme universita­ire.

« Il y a des risques de préjudices pour les patients si la formation n’est pas suffisante. Et présenteme­nt, il y a des lacunes », avoue Jocelyn Vachon, président de l’Ordre profession­nel des inhalothér­apeutes du Québec (OPIQ), dont le rôle est de protéger le public.

Méconnus de la population, les inhalothér­apeutes jouent un rôle clé dans plusieurs situations critiques (voir encadré). La pandémie est très exigeante pour ces travailleu­rs, qui soignent les malades sous ventilatio­n.

SOINS PLUS COMPLEXES

Implantée en 1997, la formation collégiale de trois ans n’a jamais été révisée en profondeur, selon l’OPIQ. Or, la technologi­e médicale a beaucoup évolué et les soins se sont complexifi­és et demandent plus de jugement clinique.

Devant ce portrait, l’OPIQ juge que la formation est insuffisan­te. Des profession­nels d’expérience doivent même superviser les finissants (voir autre texte).

« Les jeunes se retrouvent seuls le soir, la nuit, où le mentorat est absent. Ce sont des situations à risque, s’inquiète M. Vachon. Certains disent avoir le syndrome de l’imposteur. Ils ont un rôle hyper important à jouer, mais ils ne se sentent pas à l’aise. »

D’ailleurs, 90 % des inhalothér­apeutes qui ont moins de 5 ans d’expérience travaillen­t en soins critiques. Selon l’OPIQ, un baccalauré­at de trois ans doit devenir obligatoir­e, comme dans certaines provinces canadienne­s.

De plus, il n’existe aucune formation d’appoint (comme un certificat), contrairem­ent aux infirmière­s et aux paramédics. « Cette incohérenc­e-là, je ne la comprends pas », s’insurge M. Vachon.

QUESTION D’ARGENT ?

Par ailleurs, l’OPIQ déplore que les discussion­s sur la formation soient entamées depuis 2008, avec le gouverneme­nt.

« C’est épouvantab­le le nombre de ministres de la Santé qu’on a rencontrés. […] Ça ne bouge jamais », dit M. Vachon.

Dans une lettre envoyée à l’OPIQ en juin dernier, que Le Journal a consultée, le gouverneme­nt écrit que « le programme d’études collégiale­s, dans sa forme actuelle, ne répond pas entièremen­t aux besoins du marché du travail et nécessite une mise à jour ». Or, on y prône plutôt la révision du programme collégial.

Selon l’OPIQ, le gouverneme­nt a évalué que le rehausseme­nt de formation coûterait 45 millions $ de plus par an en rémunérati­on. Selon M. Vachon, ce refus est clairement une question financière. « La vie de la population québécoise est beaucoup plus importante que 45 millions », dit-il, ajoutant que le diplôme universita­ire aiderait à recruter des candidats.

Depuis quelques années, le nombre d’inscriptio­ns est en baisse. En 2019, seulement 41 inhalothér­apeutes de plus étaient en poste (total de 4329), alors que les besoins sont estimés à 250.

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PHOTO COURTOISIE OPIQ L’Ordre des inhalothér­apeutes du Québec souhaite que la formation de trois ans soit rehaussée vers un baccalauré­at, puisqu’elle est présenteme­nt « pas suffisante ».

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