Le Journal de Montreal

VIVRE AVEC LA LEUCÉMIE LYMPHOÏDE CHRONIQUE

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La leucémie lymphoïde chronique (LLC) est le type de leucémie le plus fréquent en Amérique du Nord, avec une incidence de 5 cas par 100 000 individus. Il s’agit essentiell­ement d’une leucémie touchant les adultes, avec un âge moyen au diagnostic de 72 ans1. Bien qu’il demeure incurable, ce cancer évolue en général très lentement et, dans plusieurs cas, devient une condition chronique qui ne compromet pas la survie des patients.

Les causes responsabl­es de la LLC sont inconnues, mais des facteurs génétiques jouent un rôle important : l’incidence de cette leucémie est beaucoup plus faible chez les individus d’origine asiatique, africaine et caribéenne (et n’est pas augmentée à la suite de la migration de ces population­s en Amérique) et des formes familiales de la maladie, transmises par l’hérédité, ont été décrites.

LYMPHOCYTE­S ANORMAUX

Toutes les leucémies sont des cancers causés par une production excessive de globules blancs immatures ou anormaux qui finissent par supprimer la production de cellules sanguines normales.

Dans le cas de la LLC, le cancer provient d’anomalies (délétion, duplicatio­n) touchant certains

chromosome­s des cellules souches donnant naissance aux lymphocyte­s B.

Cliniqueme­nt, cette transforma­tion se manifeste par une accumulati­on dans le sang de lymphocyte­s B anormaux, présentant des anomalies à leur surface (présence des marqueurs CD5+ et CD23+, entre autres) qui compromett­ent leur fonction immunitair­e.

Dans les stades plus avancés de la maladie, cette hausse de lymphocyte­s (lymphocyto­se) peut s’accompagne­r d’une augmen

tation du volume des ganglions, de la rate et du foie ainsi que

d’une anémie, d’une baisse des plaquettes (thrombocyt­opénie)

et d’une baisse des neutrophil­es (neutropéni­e).

PROGRESSIO­N LENTE

On dit que cette forme de leucémie est chronique, car elle se

développe la plupart du temps très lentement et peut demeurer stable

pendant plusieurs années, sans nécessiter de traitement­s.

D’ailleurs, la LLC évolue souvent de façon asymptomat­ique et il est courant que le cancer soit diagnostiq­ué un peu par hasard, lors d’une analyse de sang de routine.

Dans ce type de LLC de stade précoce (Stade 0 dans la classifica­tion de Rai ou Stade A dans celle de Binet), le nombre de lymphocyte­s dans le sang est trop élevé,

mais les quantités des autres types de cellules sanguines sont

normales (ou tout juste en deçà des normales).

Dans ce cas, on choisit généraleme­nt de ne pas traiter le cancer et de plutôt surveiller attentivem­ent

son évolution : contrairem­ent aux leucémies aiguës, la LLC à ce stade précoce ne représente pas une urgence médicale.

Plus de la moitié des patients sont encore en vie 10 ans et parfois beaucoup plus après le diagnostic, avec un grand nombre d’entre eux qui n’auront même jamais besoin de traitement­s.

De plus, puisque la LLC touche préférenti­ellement les personnes âgées, beaucoup de patients

peuvent mourir de maladies autres que de leur leucémie dans les années qui suivent le diagnos

tic.

UNE MALADIE CHRONIQUE

La LLC est donc un cancer très particulie­r, dans la mesure où il s’agit dans la plupart des cas d’une maladie chronique avec laquelle les patients doivent apprendre à vivre durant les dernières années de leur vie.

Des traitement­s efficaces ont été développés au cours des dernières années pour améliorer la survie en cas de progressio­n de la maladie, mais l’objectif idéal est évidemment de maintenir le plus longtemps possible ce cancer dans un état stationnai­re, sans trop de danger pour la santé.

En ce sens, on sait depuis plusieurs années que le microenvir­onnement dans lequel évoluent les cellules cancéreuse­s joue un

rôle important dans cette progressio­n, et il semble que ce soit aussi le cas pour la LLC2.

L’inflammati­on chronique, la formation de nouveaux vaisseaux sanguins par le processus d’angiogenès­e et l’acquisitio­n d’une résistance à l’éliminatio­n par les cellules immunitair­es sont tous des facteurs qui contribuen­t à la progressio­n des cancers, incluant la LLC.

Pour les patients atteints de la maladie à un stade précoce, il peut donc être avantageux d’adopter des habitudes de vie qui minimisent l’impact de ces facteurs du micro-environnem­ent tumoral.

Une alimentati­on riche en végétaux et dépourvue d’aliments industriel­s ultra-transformé­s, l’exercice physique régulier et

le maintien d’un poids corporel normal sont tous des facteurs

qui favorisent l’établissem­ent d’un climat anti-inflammato­ire et anti-angiogéniq­ue pouvant priver les cellules cancéreuse­s d’un outil

essentiel à leur croissance et permettre de maintenir la LLC dans

un état latent.

1. Hallek M et coll. Chronic lymphocyti­c leukaemia. Lancet 2018 ; 391 : 1524-1537.

2. Burger JA et JG Gribben. The micro-environmen­t in chronic lymphocyti­c leukemia (CLL) and other B cell malignanci­es: insight into disease biology and new targeted therapies. Semin. Cancer Biol. 2014 ; 24 : 71–81.

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