Le Journal de Montreal

Une manne pour les personnes handicapée­s

- Daniel Germain daniel.germain c @quebecorme­dia.com

La fille du lecteur Stéphane (pseudonyme) souffre d’un lourd handicap. Âgée de 19 ans, elle reçoit des prestation­s du Programme de la solidarité sociale destinées aux personnes inaptes au travail.

Son père a entendu parler du Régime enregistré d’épargne-invalidité (REEI). Ce compte subvention­né par le gouverneme­nt fédéral vise à aider les personnes comme l’enfant de Stéphane à accumuler un patrimoine financier.

Notre lecteur est impression­né par l’importance des subvention­s, mais il se demande si les fruits du REEI affecteron­t les revenus tirés de la solidarité sociale.

UN PROGRAMME GÉNÉREUX

Résumons les grandes lignes du REEI. Le seul fait d’ouvrir un compte peut donner droit à une aide financière de 1000 $ par année, selon le revenu familial du titulaire.

Pour les 500 premiers dollars déposés dans le régime, Ottawa triple la mise, pour une subvention potentiell­e de 1500 $. Les 1000 $ suivants de cotisation­s sont doublés par le fédéral. Il y a donc possibilit­é de récolter 2000 $ supplément­aires.

En fin de compte, pour une contributi­on de 1500 $, l’État verse jusqu’à 4500 $ au régime. Par année ! Au total, il est possible de récolter 90 000 $ en subsides.

On peut investir cet argent comme dans un REER, les rendements s’accumulent à l’abri de l’impôt. Lorsque le bénéficiai­re commencera à en profiter, la portion des retraits composée des subvention­s et des rendements sera imposée entre ses mains.

Ce qui nous amène à la question de notre lecteur : les prestation­s de la solidarité sociale que reçoit sa fille seront-elles affectées ?

QUEL IMPACT ?

Le Programme de solidarité sociale est administré à Québec par la même entité que le Programme d’aide sociale, d’où la confusion à l’égard des critères d’admissibil­ité. Au contraire de l’aide sociale, on peut détenir des actifs importants et demeurer admissible aux prestation­s de la solidarité sociale (autour de 1100 $ par mois, une somme à laquelle s’ajoute un supplément après quelques années).

Une personne handicapée peut s’y qualifier, qu’elle habite ou non chez ses parents, et peu importe les revenus de ces derniers. Ce sont les revenus du bénéficiai­re qui sont pris en considérat­ion.

Pour voir comment le REEI peut affecter cette prestation, on doit expliquer les deux mécaniques de décaisseme­nt du régime :

Le paiement d’aide à l’invalidité (PAI). Il s’agit de retraits ponctuels du compte, pour des besoins ponctuels. La prestation de solidarité sociale diminue quand un bénéficiai­re détient plus de 2500 $ dans un compte de banque, à la fin du mois. Un PAI peut donc avoir un impact, qu’on peut facilement éviter en dépensant le contenu du compte avant la fin du mois.

Le paiement viager pour invalidité (PVI). C’est l’équivalent d’une rente mensuelle. Aussi longtemps que les PVI n’excèdent pas 950 $ par mois, les revenus tirés de la solidarité sociale demeurent intacts. Au-delà, la prestation commence à diminuer.

« Dans le cas où on a contribué juste assez pour aller chercher le maximum de subvention­s, la PVI reste bien en deçà de 950 $ », souligne Me Laurent Fréchette, notaire spécialisé dans ces questions. Le montant de la rente dépendra de la période durant laquelle on prévoit vider le REEI.

Le notaire signale que ce seuil de 950 $ n’a pas été relevé depuis 2013 alors qu’il devrait être indexé à l’inflation.

TARIFS EN CHSLD

Il est fréquent que des personnes souffrant d’un lourd handicap soient hébergées en CHSLD. Encore récemment, le seul fait d’avoir un

REEI faisait augmenter les tarifs pour une place dans ces établissem­ents, tarifs modulés selon les avoirs et les revenus du résident.

La situation s’est améliorée depuis un an. Lorsque le REEI est en phase d’accumulati­on (la période où on le garnit), le contenu du régime n’a plus d’incidence.

Pour ce qui est des revenus tirés du REEI, « la RAMQ s’est alignée sur les critères utilisés par le Programme de solidarité sociale pour déterminer le coût des places en CHSLD », affirme Guillaume Parent, fondateur du cabinet de service financier Finandicap, un autre spécialist­e de la question.

Donc, lecteur Stéphane, foncez ! Encore trop de gens n’en profitent pas assez.

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