Entendez-vous Justin qui rigole ?
La chance existe en politique.
Vous pouvez être un médiocre, mais si vos adversaires sont franchement pathétiques, vous êtes sauvé.
De ce point de vue, Justin Trudeau doit être le politicien le plus chanceux en Occident.
TRUMP
« Plus le Parti conservateur ressemblera à une version “light” du parti républicain sous la férule de Donald Trump, plus Justin Trudeau sera heureux. »
Le « convoi de la liberté » venait à Ottawa pour réclamer sa tête et la fin des mesures sanitaires.
Il a obtenu la tête du chef conservateur et récolté toute la rancoeur des résidents d’Ottawa. Bravo, champions !
Mort de rire, Trudeau peut aussi envisager l’avenir avec quiétude.
Le « convoi de la liberté » a en effet dévoilé la direction future que beaucoup de conservateurs veulent que leur parti prenne… et Justin Trudeau ne demande pas mieux.
Il se passe quelque chose de nouveau au sein des conservateurs canadiens.
Aux factions traditionnelles – libertariens, droite morale, conservateurs fiscaux, « progressistes-conservateurs » – s’ajoute maintenant une faction tentée par le trumpisme.
Elle fait les yeux doux à ceux qui ont mis Ottawa en état de siège, quand elle n’en fait pas intégralement partie.
Pierre Poilievre, le favori pour succéder à Erin O’Toole, a fermement soutenu le convoi, n’en a que pour la liberté individuelle d’être vacciné ou pas, et pourfend les médias traditionnels.
ÇA VOUS RAPPELLE QUELQUE CHOSE ?
La nouvelle cheffe intérimaire, Candice Bergen, qu’on a vue coiffée d’une casquette MAGA, l’a aussi appuyé.
Sitôt Mme Bergen installée, les députés conservateurs québécois de premier plan furent écartés de leurs positions d’influence, comme Gérard Deltell, ou, voyant la direction du vent, se retirent sur la pointe des pieds, comme Alain Rayes.
Les valeurs traditionnelles du Parti conservateur sont en gros : gouvernement limité, entreprise privée, responsabilité individuelle, famille et respect des compétences provinciales. C’est assez large pour convenir à bien du monde.
Pensez-vous qu’un Canadien modéré, qui cherche à se débarrasser de Trudeau, sera attiré par un parti qui se laisse pénétrer par des porteurs de drapeaux confédérés et de QAnon, et qui arborent des pancartes disant « Fuck Trudeau » ?
Pensez-vous que cet électorat modéré sera séduit par le conspirationnisme, le rejet des institutions, le langage ordurier, les réflexes autoritaires et le culte de l’homme providentiel ?
Il y a certes des différences fondamentales entre le Canada et les ÉtatsUnis, mais le virus idéologique venu du Sud a indiscutablement traversé la frontière.
ALTERNATIVE
Un souverainiste comme moi pourrait se foutre du sort du Parti conservateur, d’autant que sa possible dérive ferait superbement l’affaire du Bloc Québécois.
Mais dans tous les cas de figure, il est malsain que le parti au pouvoir ne soit pas talonné par un parti d’opposition qui puisse être une alternative crédible.
Le Parti conservateur risque de devenir, comme plusieurs le notent au Canada anglais, une version de droite du NPD : un parti moralisateur qui préfère avoir raison plutôt que de faire des compromis pour se rapprocher du pouvoir.
Plus le Parti conservateur ressemblera à une version « light » du parti républicain sous la férule de Donald Trump, plus Justin Trudeau sera heureux.