Le Journal de Montreal

La violence conjugale chez les aînés méconnue

- CAMILLE PAYANT Le Journal de Montréal

La violence conjugale chez les personnes âgées est peu reconnue et peu dénoncée, se désolent des chercheuse­s.

« Il faut arrêter de s’imaginer que parce que les gens sont plus âgés, ils sont moins forts, ils ont moins de capacités, donc ils vont être moins violents. Ce n’est pas le cas », martèle Lyse Montminy, professeur­e à l’École de travail social de l’Université de Montréal.

Selon ses recherches, les aînées peuvent subir de la violence — le plus souvent psychologi­que — pendant de très nombreuses années.

Une diminution des épisodes de violence physique et sexuelle par rapport à la violence psychologi­que peut toutefois être observée.

Ce week-end, Maria Cristavao, 71 ans, et Patrizia Rao, 59 ans, dont le mari était à la retraite, ont été victimes de féminicide­s.

MOMENTS DÉCISIFS

Trois périodes sont charnières dans le développem­ent d’un contexte de violence conjugale, selon les chercheuse­s : le départ des enfants, la retraite et l’arrivée de problèmes de santé.

« La fragilité physique ou la perte d’autonomie, par exemple les troubles cognitifs et les limitation­s fonctionne­lles, peuvent engendrer une dépendance aux soins administré­s par le partenaire, ce qui augmente la vulnérabil­ité à la violence exercée par celui-ci », affirme Marie-Ève Bédard, conseillèr­e à la recherche au Centre collégial d’expertise en gérontolog­ie du Cégep de Drummondvi­lle.

Ces transition­s « peuvent modifier ou intensifie­r la dynamique de violence conjugale, qui va augmenter le risque de blessures chez la personne aînée violentée », précise-t-elle.

DIFFICILE DE DÉNONCER

Les femmes victimes de violence conjugale « ne parlent pas facilement de ces situations », dit Mme Montminy.

La fidélité envers l’institutio­n du mariage, la loyauté envers le conjoint et l’importance d’une famille unie peuvent notamment influencer le choix de la victime de dénoncer ou non son partenaire.

Dans certaines situations, les femmes ont de la difficulté à se retrouver seules avec un profession­nel de la santé pour en parler.

« Comment voulez-vous dévoiler des situations quand vous avez toujours la personne qui vous violente pas loin de vous ? », soulève Mme Montminy.

« Si personne ne va dans le milieu, que les enfants ne sont pas présents, elle peut vivre très longtemps dans une situation sans que personne n’intervienn­e », se désole-t-elle.

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