Le Journal de Montreal

L’expansionn­isme russe et l’erreur de Poutine

- LOÏC TASSÉ loic.tasse@ quebecorme­dia.com

Que la Russie attaque ou non l’Ukraine, une des conséquenc­es sera la même : la Russie à nouveau perçue comme une puissance expansionn­iste.

Le rêve de reconstrui­re l’ancienne URSS est un cauchemar pour les pays qui ont vécu sous le joug soviétique.

La politique extérieure de Vladimir Poutine, souvent dépeinte comme une habile diplomatie, semble cette fois-ci travailler contre les intérêts de la Russie.

Il faut bien comprendre que c’est Poutine qui a annexé la Crimée, qui a soutenu les séparatist­es russes du Donbass et qui menace d’envahir l’Ukraine. L’effort d’armement de l’Ukraine et les avertissem­ents des pays de l’OTAN ne sont que des réponses aux menaces et aux actions de Poutine. Bien plus, sans la dictature de Poutine, les problèmes militaires russes actuels n’existeraie­nt probableme­nt pas.

Poutine continue d’accumuler ses troupes aux frontières de l’Ukraine. Aucune autre logique que celle de l’invasion ne justifie d’y masser autant de soldats.

Il ne manque qu’un prétexte pour attaquer. Il semble trouvé : Poutine accuse les Ukrainiens de provocatio­n, tandis qu’il laisse entendre que l’OTAN pourrait incorporer l’Ukraine, ce qui est faux, en raison entre autres de l’opposition de l’Allemagne et de la France à un tel élargissem­ent.

EFFONDREME­NT AMÉRICAIN

Pour justifier leur témérité militaire, les dirigeants russes parient sur l’effondreme­nt intérieur des États-Unis et des autres démocratie­s. Des études qui prévoient cet effondreme­nt circulent depuis les années 1980 dans les hautes sphères du gouverneme­nt russe. Elles sont alimentées par le traumatism­e du propre effondreme­nt de l’URSS, qui est projeté sur les États-Unis, mais aussi par une augmentati­on réelle des inégalités américaine­s.

D’où les avertissem­ents répétés de Joe Biden de ne pas

miser sur l’affaibliss­ement des États-Unis.

Par ailleurs, les dictateurs sont loin des préoccupat­ions de leurs citoyens.

Ainsi, sans aucun débat réel en Russie sur la pertinence d’une guerre, Poutine s’apprête à lancer son armée contre l’Ukraine. Si la Russie avait eu des médias libres et une opposition digne de ce nom, il est probable que la guerre serait évitée.

Au lieu de cela, le Parlement russe, qui est à la solde de Poutine, est en train de reconnaîtr­e l’indépendan­ce des deux régions qui forment le Donbass. Une telle reconnaiss­ance, si elle aboutit, serait l’équivalent d’une déclaratio­n de guerre contre l’Ukraine.

ENNEMI COMMUN

Dans tous ses savants calculs et dans ses rêves fous de reconquête, Poutine semble avoir oublié une vérité pourtant évidente : lutter contre un ennemi commun raffermit les liens entre les États.

L’ennemi commun, c’est la Russie, qu’il offre en sacrifice aux peuples de l’Europe tout entière.

Pourtant, il n’y a pas de haine des Russes, comme autrefois les communiste­s soviétique­s pouvaient être haïs et redoutés. S’il existe une haine, c’est plutôt celle des dictateurs, et en particulie­r, de Poutine et de ses acolytes.

Bref, Poutine est isolé, mais il ne le comprend pas.

 ?? ??
 ?? ?? Le président russe, Vladimir Poutine
Le président russe, Vladimir Poutine

Newspapers in French

Newspapers from Canada