Le Journal de Montreal

L’expérience de la dure façon

- RÉJEAN TREMBLAY rejean.tremblay@quebecorme­dia.com

Difficile de faire plaisir à tout le monde. Quand Arslanbek Makhmudov démolit un adversaire en moins de deux rounds, des gens se plaignent qu’on lui offre des jambons.

Quand on lui présente Mariusz Wach, six pieds et huit et 261 livres, avec douze rounds contre Wladimir Klitschko, jamais mis knock-out avant le huitième round et que Makhmudov a besoin de six gros rounds pour l’assommer, les mêmes fefans se plaignent que le grand Russe a une fiche gonflée et est juste bon pour les combats locaux.

Faudrait savoir ce que vous voulez… à part regarder la boxe gratos à TVA.

UNE EXPÉRIENCE ESSENTIELL­E

La vérité est très simple. Arslanbek Makhmudov avait besoin d’expérience. Il avait besoin d’être confronté à des défis différents, compliqués et dangereux.

Samedi soir, il a réalisé après deux ou trois rounds que les choses ne se passaient pas comme d’habitude. Le Polonais de 42 ans avait encore de la bonne boxe en lui. Même s’il avait perdu de la vitesse, Wach prenait les bonnes décisions et savait se réfugier derrière son long jab.

« Après le combat, Arslanbek est venu me voir et on a jasé. Il a réalisé qu’il avait laissé les émotions prendre le dessus sur son plan de match. Qu’il a décoché trop de longs coups en moulinet pour essayer de faire tomber Wach. Il a eu besoin d’un peu de temps pour retrouver tout son aplomb. Mais c’est une expérience essentiell­e qu’il est allé chercher. Il faut qu’il affronte des boxeurs de ce calibre si on veut l’envoyer vers Joshua et les autres grands de la catégorie », expliquait Camille Estephan en se reposant, hier.

Et plus on grimpe vers les sommets des divisions et plus les mises hors de combat en moins de trois rounds sont rares.

Mais je présume que les frustratio­ns de la pandémie sont trop lourdes à porter pour réfléchir cinq minutes.

RAMSAY PLUS OU MOINS CONTENT

D’ailleurs, Marc Ramsay était plus ou moins content après la victoire décisive de Makhmudov. « Dès le départ, avant la présentati­on des boxeurs, Wach est venu se planter devant Arslanbek pour le défier du haut de ses six pieds et huit pouces. C’était la première fois qu’un adversaire osait faire ça à Makhmudov. Il voulait lui faire mal, il était furieux avant même le début du combat et je l’ai bien senti. Je lui ai dit de laisser faire et de se concentrer sur sa boxe, mais il voulait juste lui arracher la tête », expliquait Ramsay hier.

« Je n’ai pas été capable de le ramener dans le plan de match de tout le combat. Après sa victoire, son entourage festoyait dans le vestiaire. Je leur ai demandé de sortir. J’avais des choses à discuter avec Arslan. On l’a fait, et tout de suite. Heureuseme­nt, on a vécu ça avant qu’il ne se retrouve dans un grand combat à Las Vegas ou à New York. Vaut mieux vivre ces distractio­ns tout de suite. Ça ne s’apprend pas dans un gymnase, ces games mentales. C’est ça, prendre de l’expérience », confie Ramsay.

Quand même, jamais personne n’avait étendu Wach en six rounds. Pas Klitschko, pas Dillan Whyte, pas Hughie Fury. Même que le Polonais a fait la limite contre ces gros noms des lourds.

Makhmudov l’a fait.

KEAN : LES COUILLES

Simon Kean n’a pas été capable de s’endormir avant quatre heures du matin après sa dramatique victoire contre Shawndell Terrell Winters. Faut dire que Kean a vécu une soirée forte en émotions. Quand au sixième round, Winters l’a pincé avec un crochet de la gauche sur la mâchoire et qu’il s’est retrouvé au plancher après avoir fait une pirouette sur le dos, il a eu peur de revivre le cauchemar contre Dillon Carman. « Mais je n’étais pas trop amoché. Je me suis relevé et j’ai vu que je n’étais pas si mal. J’entendais mon coin me dire de garder mes mains plus haut pour me protéger et je suis reparti. Je n’ai pas paniqué. Quelque part au fond de moi, je me demandais si j’avais les couilles pour faire ce métier », riait Kean quand je l’ai réveillé hier avant-midi.

AVOIR LA PREUVE

Kean n’a pas à s’inquiéter pour les couilles. Et en se relevant après ce crochet dévastateu­r il s’est prouvé qu’il était capable de se remettre d’une sévère taloche. Et c’en était toute une, allez la revoir.

Mais le combat contre Winters, un boxeur habile et expériment­é, a montré que Simon Kean avait encore des choses à apprendre. Comme de garder ses mains plus haut.

Comme de lancer un jab de puissance sans s’ouvrir pour une droite. Comme d’économiser son énergie en restant plus détendu.

Vincent Auclair ne changera pas Simon Kean en ballerine, mais à 33 ans, le Grizzly me semble avoir plus de résistance à 240 livres qu’à 249.

Et puis, Simon Kean est un géant de six pieds et cinq pouces, il est blanc, il est olympien et il a une fiche de 21 victoires et une seule défaite.

Autrement dit, le matchmaker Stéphane Loyer reçoit des offres de combat pour le Grizzly trop souvent à son goût. Ce genre de poids lourd est toujours payant quelque part sur la planète.

Mais ce qu’on veut, c’est qu’il ne se fasse pas blesser et qu’il pratique un sport qu’il aime…

DANS LE CALEPIN - Sans doute par crainte de Virginie Assaly, la directrice générale d’EOTTM, Mario Lacroix et Marco Bergeron, les deux patrons « sports de combat » de la Régie des alcools, des courses et des jeux, brillaient par leur absence. Pourtant, des p’tits vestons de la RACJ, y en avait à la tonne…

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 ?? PHOTO COURTOISIE VINCENT ETHIER, EOTTM. ?? Arslanbek Makhmudov a maintes fois ébranlé sévèrement son rival Mariusz Wach samedi soir au Casino.
PHOTO COURTOISIE VINCENT ETHIER, EOTTM. Arslanbek Makhmudov a maintes fois ébranlé sévèrement son rival Mariusz Wach samedi soir au Casino.

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