Le Journal de Montreal

Le vrai scandale derrière les six mois

- MARIO DUMONT mario.dumont @quebecorme­dia.com

La loi 96 est contestée, et c’est normal. La recherche d’un équilibre

délicat entre la protection du français et les droits de la communauté anglophone est déjà un exercice délicat. Lorsque s’ajoute le questionne­ment concernant ce qu’il est légitime ou non de demander aux nouveaux arrivants, l’exercice devient de l’équilibris­me. Avec les sensibilit­és de 2022 en fond de scène !

Je m’attarderai à une toute petite mesure qui est devenue symbolique et qui est attaquée sur deux fronts. La communauté anglophone et le mouvement woke dénoncent le fait qu’après seulement six mois au Québec, un immigrant devra avoir ses communicat­ions avec l’État en français.

Le courrier de la SAAQ pour le permis de conduire, une réclamatio­n de Revenu Québec ou le renouvelle­ment de la carte d’assurance-maladie, les correspond­ances seront en français. Cette nouvelle règle imposée par la loi 96 apparaît trop restrictiv­e, trop exigeante et pourrait mettre dans l’embarras certains de nos nouveaux citoyens.

Six mois, c’est en effet bien peu. En demandons-nous trop ? Serions-nous en train de passer dans l’intoléranc­e en prétextant vouloir défendre le français ? Après tout, pour un adulte, apprendre une langue, ce n’est pas si simple. Si je déménageai­s au Japon, est-ce que je pourrais me débrouille­r dans la langue du pays après six mois pour toutes mes correspond­ances gouverneme­ntales ?

Je suis en train de vous prouver que c’est assez facile de bâtir un argumentai­re émotif pour crier au scandale. Vous voulez connaître ma position ? Je trouve que six mois, c’est assez peu de temps. Mais ce n’est pas un scandale. Le Québec ouvre ses portes et ses bras, offre tous ses services publics et réclame un effort.

Mais j’avoue que l’effort est gros. Si l’on remplaçait les six mois par douze mois, ce ne serait pas un scandale non plus. Québec solidaire propose deux ans. Un peu plus de souplesse. C’est sujet à discussion.

Cependant, ce qui me choque, c’est que la discussion autour des six mois est en train de faire oublier le véritable scandale. Jusqu’à aujourd’hui, l’État québécois se contente d’offrir le choix. Quelqu’un arrive au Québec où la langue officielle est le français et se fait offrir un choix de langue.

Deux petites cases. La personne qui coche l’anglais aura sa correspond­ance en anglais jusqu’à nouvel ordre. Ce sera pour toujours dans bien des cas. SAAQ, RAMQ, ministères, hôpitaux, écoles, chaque fois que la personne doit interagir avec l’État québécois, cela se passera en anglais.

Et nous nous demandons pourquoi le message de la nécessité d’apprendre le français ne passe pas toujours ? Le message inverse est puissant ! Chaque fois que vous correspond­ez avec le représenta­nt de la collectivi­té, l’État, l’anglais, c’est parfait. Un jour, quelqu’un va vous arriver en disant que « la langue ici, c’est le français ! » Peine perdue, le message est trop contradict­oire.

Voilà un sacré scandale qui dure depuis longtemps. Si vous me parlez du problème des six mois en oubliant l’outrage qu’est le statu quo, je n’écoute plus.

Bien qu’imparfaite, la loi 96 corrige des problèmes réels.

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