Le Journal de Montreal

Peine de 40 mois pour avoir abusé d’un élève

L’éducatrice spécialisé­e dit qu’elle aimait sa victime

- ERIKA AUBIN

Une technicien­ne en éducation spécialisé­e qui croyait vivre une histoire d’amour avec son élève âgé de 16 ans a plutôt écopé de 40 mois de détention au pénitencie­r pour l’avoir agressé sexuelleme­nt.

« L’accusée, une éducatrice spécialisé­e formée pour intervenir auprès de jeunes vulnérable­s, a créé un climat de dépendance et a profité de cette situation [pour abuser son élève] », a déploré la juge Sophie Lavergne en condamnant Geneviève Rioux, hier, au palais de justice de Saint-Jérôme.

La femme de 44 ans avait admis en juillet dernier avoir eu des relations sexuelles complètes pendant plus de cinq mois, en 2018, avec l’adolescent, dont l’identité est protégée par la cour. Celui-ci avait développé une relation fusionnell­e avec son éducatrice.

Elle avait d’ailleurs tenu à rester dans la vie du jeune homme après son départ de la polyvalent­e Sainte-Thérèse.

Elle profitait de moments seuls avec lui à son domicile ou dans sa voiture pour l’agresser.

« La participat­ion de l’adolescent à l’activité sexuelle n’est pas un facteur atténuant » comme a tenté de soulever la défense, a insisté la juge Lavergne.

« Le déséquilib­re de pouvoir rend le consenteme­nt invalide », a-t-elle souligné, rappelant qu’un mineur ne peut consentir à des relations sexuelles avec une personne en position d’autorité.

D’autant plus que la victime vit avec plusieurs problémati­ques, ce qui ajoute à la responsabi­lité et culpabilit­é morale de Rioux, selon elle.

COMME CÉLINE ET RENÉ

Lors des observatio­ns sur la peine, l’éducatrice a avoué être tombée amoureuse de son élève.

« C’est comme si mon âme était amoureuse de son âme », a-t-elle dit.

Elle a même voulu relativise­r sa relation en la comparant à celle entre la chanteuse Céline Dion et son gérant René Angélil.

La magistrate a toutefois rejeté cet argument voyant même dans ce discours des éléments « inquiétant­s ».

« Elle continue à parler à ce jour d’une relation amoureuse atypique. Elle réfère à cette période de sa vie comme une grande peine d’amour. Ce qui est préoccupan­t et pour le moins surprenant, c’est que ces propos sont tenus à la cour plus de deux ans [plus tard] », a-t-elle noté. Selon la juge, l’éducatrice déchue a encore un travail à faire pour comprendre les notions de consenteme­nt libre et éclairé.

ELLE RECOMMENCE

Collègues de travail, direction de l’école, grand-père de la victime et une première arrestatio­n : Rioux avait été mise en garde par plusieurs personnes du caractère inadéquat de la situation, a détaillé la juge Lavergne. « Elle a trahi la confiance de plusieurs. »

Elle avait ensuite fait fi de ses conditions de remise en liberté pour continuer à voir et à agresser le garçon. C’est ce qui l’avait menée à se faire passer les menottes une deuxième fois en 2019.

Ce non-respect des conditions pour lequel elle avait aussi plaidé coupable n’a pas joué en sa faveur. La magistrate a ainsi rejeté la suggestion jugée trop clémente de la défense, qui demandait 90 jours de prison à purger les week-ends.

Elle s’est plutôt rangée derrière la procureure de la Couronne, Me Caroline Lafleur, qui réclamait une peine dissuasive afin d’envoyer un message clair.

Il sera interdit à la technicien­ne en éducation spécialisé­e d’occuper un emploi qui la placerait en position d’autorité après sa sortie du pénitencie­r. Elle sera aussi inscrite à vie au registre des délinquant­s

sexuels.

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PHOTO MARTIN ALARIE Geneviève Rioux, 44 ans, à son arrivée au palais de justice de Saint-Jérôme, hier, peu de temps avant d’être condamnée à 40 mois de pénitencie­r.
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CAROLINE LAFLEUR Procureure de la Couronne

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