Un mentor montréalais
L’entraîneur Paulo Saldanah est très fier du retour en force du champion britannique
La performance de Chris Froome, hier, lors de la 12e étape du Tour de France, risque d’être oubliée rapidement, mais pas par le gourou montréalais Paulo Saldanah, qui sait à quel point le Britannique a bûché pour retrouver un niveau compétitif.
Un peu inconnu du grand public, Saldanha s’est forgé une solide réputation sur la scène internationale en cyclisme sur route. L’entraîneur préfère toutefois l’ombre à la lumière et il faut insister un peu pour lui parler de ses succès.
Ancien triathlonien, Saldanah occupe le poste de directeur de la performance pour l’équipe IsraelPremier Tech. Sa route a débuté avec la défunte équipe SpiderTech de Steve Bauer, il y a une dizaine d’années.
Il travaille aujourd’hui étroitement avec Michael Woods, Guillaume Boivin, Jakob Fuglsang et Chris Froome.
UNE FORCE DE CARACTÈRE
Depuis sa terrible chute lors du Dauphiné en 2019, Froome pédalait à reculons vers son passé. À 37 ans, la plupart auraient accroché le vélo sur un clou du garage.
« Le succès des athlètes, c’est ça qui me drive. Je veux trouver la solution, la pièce manquante du casse-tête. Pour Froome, il y avait quatre ou cinq morceaux à trouver. C’est le plus tough que j’aie pu voir. Dans sa tête, il n’a jamais abandonné. Même si tout le monde disait qu’il était fini. C’est l’état d’esprit d’un champion et il ne le perdra jamais », lance Saldanah.
Après avoir passé quelques jours sur le Tour de France, le spécialiste était de retour dans les Cantons-de-l’Est, où il a pu assister au résultat de son poulain hier. Dans ce sport, la chance sourit souvent aux attaquants.
« C’était un très long chemin. Il y a eu des erreurs, des blessures, la maladie… Je voulais vraiment qu’il gagne une étape pour montrer qu’il est de retour. Avec Pidcock dans l’échappée, ce n’était pas évident. Au moins il a montré qu’il peut le faire. Il a tellement travaillé depuis deux ans », ajoute-t-il.
UN SUPPORT COMPLET
Refusant les fleurs et le bouquet, Saldanah a préféré donner le crédit à l’épouse de Froome, qui se trouvait hier à deux kilomètres de l’arrivée au sommet de l’Alpe d’Huez.
« J’échangeais des messages avec elle. Ça prend une équipe complète pour supporter un athlète. Sans elle, on n’aurait pas réussi. »
Et même si le Britannique retrouvait ses aptitudes d’antan, l’entraîneur doit avouer que les prouesses des jeunes cyclistes comme Pidcock, qui a 15 ans de moins, sont beaucoup plus élevées que celles de la génération précédente.
Avant d’aider à rebâtir Chris Froome, Saldanah a d’abord cru au potentiel de Mike Woods, ancien coureur de demi-fond blessé. Le natif d’Ottawa est désormais la seule personne à avoir couru le mile en moins de 4 minutes et terminé un Tour de France.
Spécialisé dans les sports d’endurance, Saldanah a aussi collaboré au fil des ans avec l’olympienne Manon Jutras, de même qu’avec les médaillés d’or Jennifer Heil et Alex Bilodeau.
UN SOULAGEMENT
« Je ne sais pas si j’ai une notoriété internationale. Je travaille dans l’ombre, derrière les athlètes. Dans l’équipe, on m’appelle “the mad scientist” ! [le savant fou] », a-t-il conclu avec humilité.
« Paulo [Saldanah] ne le dira jamais publiquement, mais c’est incroyable les efforts qu’il a faits avec Froome. Il a versé quelques larmes en le voyant au sommet de l’Alpe d’Huez. C’était le soulagement de voir la résilience extraordinaire de ce champion enfin récompensé », a aussi expliqué Dominick Gauthier, cofondateur de B2dix, un organisme qui soutient des athlètes.