Le Journal de Montreal

Plus de 250 000 $ en contrats à l’entreprise du conjoint de la PDG

La société d’État assure que Sophie Brochu n’a rien à voir dans le processus de choix

- FRANCIS HALIN, MARIE CHRISTINE TROTTIER, CHARLES MATHIEU – Avec la collaborat­ion de Philippe Langlois

Hydro-Québec a payé plus de 250 000 $ pour acheter des formations de la firme du conjoint de sa PDG, Sophie Brochu, depuis sa nomination, et a même fait appel à elle pour en animer à ses employés.

Le 25 octobre dernier, Le Journal révélait qu’une formation de Sophie Brochu offerte à L’effet A a généré des recettes de près de 50 000 $ à la firme de son conjoint, John Gallagher.

Or, en examinant des données d’Hydro-Québec, on constate que 536 000 $ ont été versés à L’effet A depuis mars 2016. De ce montant, 251 000 $ ont été dépensés depuis l’arrivée de Mme Brochu, le 1er avril 2020.

Au total, presque autant d’argent a été dépensé en deux ans et demi sous Sophie Brochu à L’effet A que lors du règne du précédent PDG, Éric Martel, à 34 000 $ près.

La société d’État assure néanmoins que la nomination de Mme Brochu n’y est pour rien parce qu’elle faisait affaire avec L’effet A bien avant son arrivée.

« Sophie Brochu n’est intervenue d’aucune manière susceptibl­e de favoriser L’effet A, ces décisions n’ont jamais relevé d’elle. De plus, Hydro-Québec inscrit des participan­tes à L’effet A depuis 2016, alors qu’Éric Martel était PDG », a expliqué son chef des médias, Philippe Archambaul­t, qui rappelle que c’est la présidente du conseil d’admistrati­on qui gère ce dossier.

Cela dit, Mme Brochu a elle-même animé des formations. En 2021, sept employés d’Hydro-Québec ont suivi le « Masterclas­s 30 jours avec Sophie Brochu », offert par L’effet A, pour une facture totale de 4595 $.

DES EXPERTS S’INTERROGEN­T

Alors que l’on martèle chez Hydro que Mme Brochu « ne reçoit aucune rémunérati­on ou compensati­on pour sa participat­ion à L’effet A », des experts s’interrogen­t.

« Sans remettre en cause l’intégrité et son attachemen­t pour la cause des femmes, elle se doit d’être prudente en évitant toutes implicatio­ns directes dans l’entreprise d’une personne qui lui est liée », estime l’expert en éthique de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) Michel Séguin.

« Il faudrait qu’elle ne participe pas aux formations de L’effet A. Ça devient difficile à justifier sur le plan de la gouvernanc­e », analyse de son côté Saidatou Dicko, professeur­e de sciences comptables à l’UQAM.

« Quel genre de message ça envoie aux contribuab­les ? » se demande Nicolas Gagnon, directeur québécois de la Fédération canadienne des contribuab­les.

Pour Hydro-Québec cependant, pas question d’arrêter d’embaucher la firme du conjoint de la grande patronne de la société d’État, puisque tout est fait dans l’ordre.

« La gouvernanc­e de notre organisati­on et les règles d’éthique sont solides, ce n’est pas vrai qu’on va priver des femmes de formations pertinente­s pour leur développem­ent profession­nel, que ce soient celles de L’effet A ou d’autres », a conclu son porte-parole Maxence Huard-Lefebvre.

L’effet A a décliné nos demandes d’entrevue avec John Gallagher.

 ?? CAPTURE D’ÉCRAN TIRÉE DU WEB ?? Sophie Brochu et son conjoint, John Gallagher, à Lausanne, en Suisse, en juin 2019. Mme Brochu était alors la grande patronne du distribute­ur de gaz naturel Énergir. Elle est aux commandes d’Hydro-Québec depuis le 1er avril 2020.
CAPTURE D’ÉCRAN TIRÉE DU WEB Sophie Brochu et son conjoint, John Gallagher, à Lausanne, en Suisse, en juin 2019. Mme Brochu était alors la grande patronne du distribute­ur de gaz naturel Énergir. Elle est aux commandes d’Hydro-Québec depuis le 1er avril 2020.

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