La CAQ avale la pilule fédérale
Bien que sa demande officielle fût de 6 milliards $, le gouvernement Legault s’attendait réalistement à ce que Justin Trudeau accorde 2 à 3 milliards $ de plus par année au Québec en transferts en santé. Mais aucun élu caquiste n’est monté au front en apprenant que l’offre se limitait à un seul milliard, malgré l’urgence de redresser le réseau.
François Legault a mis sur le compte de la fatigue et de la déception sa réaction timorée aux miettes reçues d’Ottawa après un combat des provinces qui s’est étiré sur des années.
Lors du caucus hebdomadaire de la CAQ mercredi soir, personne n’a rué dans les brancards en privé non plus.
François Legault a résumé à ses députés la démarche des provinces, l’offre mise sur la table par Ottawa et la suite des discussions à l’avenir.
Une présentation de 10 à 15 minutes au terme de laquelle… aucun député n’a souhaité prendre la parole. Zéro intervention.
« On a le sentiment que M. Legault a fait le combat, alors c’est dur de venir critiquer », a confié un élu, devant mon étonnement après avoir confirmé la scène avec plusieurs sources.
Pourtant, dès que l’offre Trudeau a été dévoilée mardi, un membre de l’équipe gouvernementale, stupéfait, me disait qu’il ne s’attendait pas à ce que ce soit « si peu ».
Des fuites médiatiques en début d’année ont possiblement teinté les attentes, puisqu’elles faisaient état d’un plan de 100 milliards sur 10 ans, pour les provinces, ce qui ne s’est pas avéré.
Les élus caquistes questionnés, qu’ils soient plus « bleus » ou « rouges », soutiennent qu’il n’y a encore aucune discussion quant à un changement de positionnement du parti face au gouvernement fédéral.
DES COUPES ?
Pour l’instant, froidement, les caquistes s’inquiètent davantage que leur collègue des Finances, Eric Girard, soit tenté de couper dans leur
ministère respectif, pour financer adéquatement les importants besoins en santé.
« On a entendu M. Legault, il y a comme la recherche d’un plan B », a expliqué un autre membre du caucus.
En effet, au Salon bleu mercredi, le premier ministre a affirmé : « Même si on n’a pas obtenu l’argent qu’on voulait du fédéral, le gouvernement du Québec va investir toutes les sommes nécessaires pour mettre en place le plan du ministre de la Santé. Ça va poser des maux de tête, sur l’équilibre financier, au ministre des Finances. »
Une source gouvernementale rappelle toutefois que la baisse d’impôt de 1 % promise par la CAQ pour 2023 n’est pas compromise puisqu’elle est financée par une diminution des versements au Fonds des générations.
On souligne aussi qu’Eric Girard n’avait pas planifié de revenus supplémentaires d’Ottawa pour le budget qu’il déposera ce printemps.
Il disposera au moins du milliard de plus pour la santé, sans conditions.
PARTIE REMISE
Pour le reste, « ce n’est que partie remise », dit-on.
On soupçonne que Doug Ford avait été mis au parfum de l’offre Trudeau, à la fois pour tester sa réaction et l’amadouer. La ministre des Finances, Chrystia Freeland, se serait échappée devant les PM à Ottawa en affirmant « qu’elle avait parlé à Doug pendant le week-end ».
L’Ontario ayant décidé de ne pas contester, l’équipe Legault préfère aussi voir le verre minimalement rempli.
Les caquistes estiment que rien n’est réglé à long terme et que tant l’Ontario que la Colombie-Britannique voudront revenir à la charge aussi pour des manches supplémentaires. Je me demande à quel moment les provinces pourraient avoir un meilleur rapport de force.
Vous n’êtes pas un peu tanné, monsieur Legault ?