Il fuit la guerre à 19 ans et bâtit une compagnie de 50 M$ au Québec
Investissement Québec a misé 25 millions $ sur son entreprise de haute technologie
Une entrepreneur québécois, qui a fui la guerre civile au Liban à 19 ans avec à peine de quoi vivre, a réussi à bâtir au fil des ans une entreprise mondiale avec un chiffre d’affaires de plus de 50 millions de dollars.
« J’ai vécu la guerre du Liban au complet, entre 1975 et 1990. Je suis arrivé ici à 19 ans. On a survécu », confie au Journal Samer Saab, président directeur général- fondateur d’Explorance, qui vient de remporter le prix du PDG de l’année Association québécoise des technologies (AQT) – Investissement Québec (IQ).
Pour le dirigeant d’entreprise parti de zéro, la récompense n’a rien de banal : c’est le symbole d’une réussite qui dépasse le monde des affaires.
Car le destin de Samer Saabest est tout sauf un long fleuve tranquille.
SACRIFICE DES PARENTS
À son arrivée ici, ses parents tirent le diable par la queue et font des pieds et des mains pour que leurs enfants ne manquent de rien à l’abri des violences, qui auront coûté la vie à près de 250 000 personnes au terme du conflit.
« Ma motivation est de faire que leur sacrifice ne soit pas en vain et de pouvoir redonner au Québec, qui nous a accueillis généreusement », poursuit l’homme.
« On aime l’endroit d’où l’on vient, mais c’était rendu dur là-bas », partage-t-il.
Aujourd’hui, Samer Saab dirige une entreprise de 325 employés, dont 200 à Montréal, et une centaine d’autres en Inde, en Australie, en Jordanie, en Angleterre et aux États-Unis.
Son premier actionnaire majoritaire est le Groupe Bekai inc., qui lui appartient, et son deuxième est Investissement Québec, qui a pris une participation de 25 millions de dollars en 2021.
SOIF DE NOUVEAUX TALENTS
Pendant que des géants comme Google, Amazon, Microsoft sabrent dans leurs effectifs à coup de milliers d’emplois, Explorance est en mode embauche.
Administrateurs de base de données, développeurs, gestionnaires, ingénieurs… la firme a soif de talents pour poursuivre sur sa lancée.
SUCCÈS MONDIAL
Sa recette du succès ? Sa firme Explorance a développé des outils technos, qui servent aux compagnies et aux universités.
« On aide les entreprises à évaluer l’engagement des employés pour l’optimiser en analysant leurs données avec l’intelligence artificielle », explique-t-il.
Et la magie opère si l’on se fie au succès auprès de grands groupes mondiaux, dont 25 % de ceux du Fortune 100 qui font appel à ses services.
En plus des multinationales, Explorance oeuvre auprès des universités.
« On travaille avec Harvard, Princeton, l’Université Laval pour les aider dans l’évaluation des cours, de l’enseignement ou de l’expérience étudiant », dit-il.
Pour développer ce deuxième marché, Samer Saab l’admet : il a fallu bosser d’arrache-pied durant cinq bonnes années pour être pris au sérieux.
DE 55 000 $ À 50 M$
En entrevue au Journal, Samer Saab raconte qu’il n’a pas eu froid aux yeux quand il a démarré sa PME contre vents et marées en 2003.
« J’ai lancé l’entreprise avec 55 000 dollars. Je n’avais rien d’autre, pas de maison. Je me suis lancé naïvement pour bâtir une compagnie », laisse tomber celui qui fête les 20 ans de sa boîte cette année.
D’une poignée d’employés à plusieurs centaines, le diplômé en ingénierie et détenteur d’une maîtrise en administration des affaires est fier de son parcours.
« Je n’aurais jamais pu bâtir ça ailleurs qu’au Québec », conclut-il.
Au total, le Québec comptait plus de 44,1 % des immigrants nés au Liban au pays en 2016, d’après un portrait démographique de la Ville de Montréal effectué avec des données de Statistique Canada.
« EN 1990, LA GUERRE ÉTAIT DEVENUE TELLEMENT SALE QUE LES VOISINS S’ENTRE-TUAIENT, ALORS LE QUÉBEC NOUS A OUVERT GRAND LES BRAS » – Samer Saab, grand patron et fondateur d’Explorance