Le Journal de Montreal

Il aurait laissé mourir sa femme de faim et de soif

Paralysée par un AVC, sa conjointe ne pouvait plus prendre soin d’elle-même

- ERIKA AUBIN

Un homme de Terrebonne aurait laissé mourir dans des circonstan­ces horribles sa femme quasi paralysée après un accident vasculaire cérébral en omettant de lui prodiguer des soins de base, alors qu’elle était déshydraté­e et décharnée, en plus d’avoir une hygiène corporelle déficiente.

Johanne Bilodeau a été transporté­e d’urgence dans un état lamentable à l’hôpital le 23 septembre 2020. La femme de 58 ans est décédée moins de 24 heures plus tard.

Son mari Bruno Turcotte, 61 ans, est accusé d’homicide involontai­re pour avoir négligé de fournir les soins nécessaire­s à sa femme, dont il avait la charge, dans les semaines et mois avant son décès. Son procès devant jury s’est ouvert hier matin au palais de justice de Laval.

Le corps de la femme « présentait plusieurs plaies de pression importante­s, certaines exposant même ses os. D’autres plaies étaient également présentes, notamment des trous au niveau de sa cage thoracique », a expliqué la procureure de la Couronne, Me Geneviève Aumond, lors de son exposé d’ouverture.

La victime est décédée d’un choc septique causé par de multiples infections, selon la théorie de la poursuite.

« Ses blessures auraient pu être traitées et guéries si la victime avait reçu des soins médicaux adéquats et si ses besoins de base tels que se nourrir, s’hydrater et se laver avaient été comblés avant son transport à l’hôpital », a souligné Me Aumond.

DES LOURDES SÉQUELLES

Un accident vasculaire cérébral (AVC) survenu neuf ans plus tôt avait laissé Mme Bilodeau avec de lourdes séquelles. Elle avait besoin de soins au quotidien.

Ses bras et ses jambes gauches étaient paralysés, a expliqué sa médecin de famille, la Dre Stéphanie Sanche. Elle ne pouvait pas se déplacer, se laver, changer ses culottes d’incontinen­ce, boire de l’eau ou même se nourrir par elle-même.

Bruno Turcotte avait choisi de garder sa femme des 20 dernières années à domicile malgré son état. Il se devait de lui fournir les choses essentiell­es à la vie selon le Code criminel, a souligné Me Aumond au jury, composé de huit femmes et quatre hommes.

REFUS DE SOINS

La Couronne souhaite prouver pendant le procès que Turcotte a refusé à plusieurs reprises une offre de services médicaux supplément­aires. La travailleu­se sociale Lise Fortin, au CLSC de Terrebonne, a d’ailleurs rapporté qu’elle rencontrai­t des difficulté­s à le joindre pour les suivis.

« J’ai laissé beaucoup de messages, mais de lui parler de vive voix, ce n’était pas facile », a témoigné Mme Fortin.

Comme il s’agissait d’un cas « très lourd », elle avait proposé à Bruno Turcotte de l’aider pour les soins d’hygiène de sa conjointe lors d’une rencontre en personne en juillet 2019, ce qu’il a refusé.

Le procès présidé par le juge de la Cour supérieure Daniel W. Payette se poursuit aujourd’hui.

 ?? PHOTOS MARTIN ALARIE, ET FOURNIE PAR LA FAMILLE DE JOHANNE BILODEAU ?? Bruno Turcotte subit un procès devant jury au palais de justice de Laval pour avoir négligé sciemment de fournir les soins essentiels à la vie à Johanne Bilodeau (en mortaise), sa femme pendant 20 ans.
PHOTOS MARTIN ALARIE, ET FOURNIE PAR LA FAMILLE DE JOHANNE BILODEAU Bruno Turcotte subit un procès devant jury au palais de justice de Laval pour avoir négligé sciemment de fournir les soins essentiels à la vie à Johanne Bilodeau (en mortaise), sa femme pendant 20 ans.
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