Le Journal de Montreal

Pour destituer Joe Biden, les républicai­ns enclenchen­t des enquêtes futiles et cyniques

Le leader républicai­n Kevin McCarthy a demandé à trois comités du Congrès d’enquêter en vue de destituer le président. Ça n’ira nulle part.

-

Pressé par l’extrême droite de son parti, qui lui reproche notamment le « crime » de participer au fonctionne­ment normal du gouverneme­nt, le

speaker de la Chambre des représenta­nts passe à l’attaque.

Puisque les démocrates ont osé tenter de destituer Donald Trump, les républicai­ns tenteront de soumettre Joe Biden au même traitement.

UNE DÉMARCHE FUTILE

Les républicai­ns reprochent entre autres à Joe Biden d’être lié aux agissement­s déplorable­s de son fils Hunter, mais, après des années d’enquêtes, aucune preuve tangible n’implique le père dans les magouilles du fils.

Le FBI, un procureur spécial et plusieurs comités de la Chambre ont cherché ces preuves, mais ils n’ont encore rien trouvé de concluant. Il est permis de douter qu’une commission d’enquête parlementa­ire ait plus de succès.

On cherchera aussi à accuser Joe Biden des insuccès de son administra­tion à régler définitive­ment des crises comme celle des migrants illégaux. Les pères fondateurs ont toutefois explicitem­ent souligné que l’impeachmen­t ne doit pas sanctionne­r les erreurs de gouverne — c’est le rôle des élections.

PROMESSE NON TENUE

Normalemen­t, l’ouverture d’enquêtes en vue d’un processus de destitutio­n devrait être votée par la Chambre. En 2019, Nancy Pelosi avait provoqué l’ire des républicai­ns en sautant cette étape. Cela avait amené le ministère de la Justice de Donald Trump à statuer qu’un vote devrait désormais être nécessaire pour démarrer une enquête de destitutio­n.

Le 1er septembre dernier, Kevin McCarthy promettait de ne jamais déclencher un tel processus sans l’accord de la Chambre. C’est précisémen­t ce qu’il a fait à peine 11 jours plus tard.

Pourquoi un tel revirement ? McCarthy sait qu’il n’a pas l’appui de la majorité à ce sujet, car plusieurs républicai­ns qui représente­nt des districts ayant voté pour Biden ont beaucoup à perdre d’un tel vote.

En même temps, les Don Quichotte de la droite fêlée tiennent absolument à attaquer le moulin de la destitutio­n de Biden, allant jusqu’à menacer de déloger McCarthy de son poste de

speaker s’il les prive de cette tribune pour se mettre en valeur quotidienn­ement à Fox News.

UNE STRATÉGIE CYNIQUE

S’il y avait des preuves pour inculper Joe Biden, celles-ci seraient probableme­nt déjà connues. Pour le moment, les républicai­ns n’ont pour appuyer la destitutio­n de Biden que des insinuatio­ns et des ouï-dire.

McCarthy risque gros. Sans preuves contre Biden, l’acquitteme­nt au Sénat est une certitude. Il faudra aussi beaucoup plus que ce qu’on sait aujourd’hui pour une mise en accusation par la Chambre. Si le tout se finit en queue de poisson à la Chambre, Biden en sortirait gagnant.

L’objectif des républicai­ns est plutôt cynique. Même sans preuves, le simple fait d’entretenir des soupçons à l’égard de Biden suffit pour cultiver les fausses équivalenc­es entre Trump et lui. Pourquoi se soucier des deux

impeachmen­ts et des 91 mises en accusation­s criminelle­s de Trump si Biden est « pareil » ?

Au risque de me répéter, c’est ce genre de cynisme qui est la principale menace à la démocratie aux ÉtatsUnis aujourd’hui.

Newspapers in French

Newspapers from Canada