Don de 50 000 $ qui coûte 500 $ aux plus riches
De généreux crédits d’impôt permettent de verser des montants à des fondations pour une fraction du coût réel
La Fondation de l’Institut de cardiologie de Montréal propose à ses plus riches donateurs de faire un don de 50 000 $ qui leur coûtera à peine 500 $ en multipliant les avantages fiscaux.
Sur son site web, la Fondation vante les mérites du don d’actions accréditives de compagnies minières. Dans un document diffusé en ligne, on explique comment faire un don avec un coût réel de seulement 1 % de sa valeur.
« Le don vous revient entre 1 % et 5 % de ce que vous avez investi, c’est ça qui est intéressant. Vous avez tellement d’avantages fiscaux que vous pouvez presque tout récupérer ensuite », dit la directrice conseil aux dons majeurs et planifiés, Mélissa Brinant, au représentant de notre Bureau d’enquête qui se faisait passer pour un client intéressé.
En octobre dernier, la Fondation s’est retrouvée dans les manchettes lorsque six ex-premiers ministres du Québec avaient critiqué la réforme du ministre de la Santé, Christian Dubé. On disait alors craindre pour la capacité de certaines fondations comme celle de l’Institut de cardiologie de continuer à collecter des fonds.
STRATÉGIE POUR DES PERSONNALITÉS
La Fondation n’est pas la seule à mousser ce type de dons légal et très avantageux sur le plan fiscal pour les bienfaiteurs importants, mais elle est celle qui promet le plus grand bénéfice.
Plusieurs personnalités utilisent régulièrement cette stratégie pour faire des dons (voir autre texte en page 6), notamment auprès de la Fondation communautaire juive de Montréal, qui a recueilli environ 200 millions $ de cette façon.
Le don d’actions accréditives de minières a explosé dans la dernière décennie au pays. Elles avaient été mises en place pour stimuler la recherche dans des secteurs risqués comme l’industrie minière et pétrolière. En contrepartie, elles permettent de toucher un généreux crédit d’impôt.
SALAIRE DE 235 000 $ ET PLUS
Pour pouvoir tirer profit de cet abri fiscal, il faut toutefois faire partie des contribuables qui gagnent le plus (salaire d’au moins 235 000 $), et donc, qui paient le plus d’impôt.
« C’est quelque chose qu’on propose à nos plus grands donateurs », reconnaît Mélissa Brinant qui précise qu’il faut être en mesure d’allonger initialement jusqu’à trois fois la valeur du don pour retirer le maximum du fisc.
La Fondation de l’Institut de cardiologie a refusé de répondre à nos questions. Sa porte-parole nous a plutôt dirigés vers son site web et à des firmes qui jouent le rôle d’intermédiaire pour acheter et revendre les actions des donateurs comme WCPD et PearTree.
Grâce à ces intermédiaires, l’achat et la revente des actions se font en quelques jours à peine. De cette façon, on permet au donateur de bénéficier des avantages fiscaux liés à l’exploration minière sans risquer de perdre de l’argent (voir l’infographie ci-contre).
AU CHU DE QUÉBEC AUSSI
Du côté de la Fondation du CHU de Québec, on fait miroiter un don à un coût réel de 4,5 %.
« Ce coût réel nous vient d’une illustration fournie par les spécialistes en finance qui mettent en place la stratégie pour certains donateurs », dit Nabiha El-Hafi, conseillère aux communications de la fondation.
Elle précise que ce type de dons est accepté depuis 2016, mais qu’il représente seulement une petite fraction de leurs collectes de fonds.