Le Journal de Montreal

Des caquistes plus fédéralist­es

Le parti de François Legault compte désormais moins d’électeurs indépendan­tistes qu’en 2022

- PATRICK BELLEROSE

La CAQ compte désormais plus d’électeurs fédéralist­es qu’indé-pendantist­es. Pour s’en convaincre, il suffit d’observer comment les partisans de François Legault voteraient aux élections fédérales, dit le sondeur Jean-Marc Léger.

Mardi dernier, le premier ministre François Legault a causé la surprise en remettant en question l’utilité du Bloc Québécois.

« À quoi ça sert, le Bloc Québécois à Ottawa ? Ça sert à quoi ? Ça sert à quoi ? », a-t-il lancé au chef péquiste, Paul St-Pierre Plamondon, en l’enjoignant à l’aider dans ses démarches auprès du gouverneme­nt fédéral pour réduire le nombre de demandeurs d’asile sur le territoire québécois.

La passe d’armes a incité le sondeur Jean-Marc Léger, président de la firme Léger, à se pencher sur les allégeance­s des électeurs caquistes sur la scène fédérale, depuis la montée en force du Parti Québécois.

DÉSAFFECTI­ON DES BLOQUISTES

Et le constat est frappant. En juin 2022, les électeurs caquistes appuyaient majoritair­ement le Bloc Québécois, alors que 45 % d’entre eux disaient voter pour la formation d’Yves-François Blanchet aux élections fédérales.

Les libéraux de Justin Trudeau, eux, recevaient la faveur de 33 % des partisans de la CAQ, tandis que les conservate­urs fédéraux, sans chef permanent à ce moment-là, ne récoltaien­t que 12 % des voix.

En février 2024, le portrait est maintenant tout autre. Les troupes de Justin Trudeau ont aujourd’hui l’appui d’une majorité d’électeurs caquistes, avec 42 % qui voteraient pour le PLC si des élections avaient lieu aujourd’hui.

Le Bloc Québécois, pour sa part, est passé en deuxième position, avec 31 % des voix. Le PCC arrive toujours troisième, avec 20 %.

L’EXODE SOUVERAINI­STE

Pour Jean-Marc Léger, ces données illustrent l’exode souveraini­ste au sein de la coalition qui a porté François Legault au pouvoir à deux reprises.

Les électeurs péquistes sont retournés au bercail, faisant gonfler les appuis du PQ de 15 % à 32 %, tandis que la CAQ voyait ses résultats baisser d’autant, note le sondeur.

« C’est un transfert direct caquistes-péquistes », souligne-t-il. À présent, le tiers du vote caquiste est indépendan­tiste, contre environ 40 % de fédéralist­es, ajoute M. Léger.

En conséquenc­e, le parti de François Legault plaît désormais majoritair­ement aux électeurs libéraux, qui ne se retrouvent plus dans le Parti libéral du Québec, présenteme­nt sans chef en titre.

« Le Parti libéral est tellement faible auprès des francophon­es au Québec que ceux-ci se sont retrouvés orphelins et sont allés à la CAQ, affirme Jean-Marc Léger. C’est eux autres qui restent encore, ils n’ont pas transféré, comme avec le PQ. »

Pour le sondeur, la course à la chefferie du PLQ, qui se conclura au printemps 2025, représente donc un danger pour le parti de François Legault, si le futur chef libéral réussit à rallier les électeurs qui ont déserté depuis 2018.

« La chance de la CAQ actuelleme­nt, c’est la faiblesse du Parti libéral [du Québec] et le fait qu’ils ont pris une mauvaise décision en remettant la course à la chefferie tellement tard que ça leur laissera peu de temps pour aller chercher ce vote-là qui, en théorie, est composé d’ex-libéraux », dit Jean-Marc Léger.

« CAPITAINE CANADA »

Pour autant, le sondeur ne va pas jusqu’à dire que le gouverneme­nt Legault adapte son discours politique pour plaire davantage aux fédéralist­es.

Oui, les ministres caquistes se présentent en défenseur du Québec dans la fédération.

Le superminis­tre Pierre Fitzgibbon a même affirmé que François Legault ferait un meilleur « Capitaine Canada » que Denis Coderre pour bloquer un nouveau référendum sur l’indépendan­ce du Québec.

Mais du même souffle, les caquistes critiquent aussi allègremen­t le gouverneme­nt Trudeau, notamment dans le dossier des demandeurs d’asile.

« Ils frappent tantôt un coup gauche, tantôt un coup à droite. À court terme, depuis 2018, ça a fonctionné. Mais là, le fait que leur aile nationalis­te déserte, ça déséquilib­re le parti », résume Jean-Marc Léger.

 ?? CAPTURE D’ÉCRAN D’ARCHIVES ?? François Legault en point de presse à l’Assemblée nationale le 8 février. Au niveau fédéral, les caquistes sont désormais moins nombreux à appuyer le Bloc Québécois.
CAPTURE D’ÉCRAN D’ARCHIVES François Legault en point de presse à l’Assemblée nationale le 8 février. Au niveau fédéral, les caquistes sont désormais moins nombreux à appuyer le Bloc Québécois.

Newspapers in French

Newspapers from Canada