Le Journal de Montreal

Faire payer son ex agresseur en visant son portefeuil­le

Une femme poursuit au civil son ancien conjoint et lui réclame 375 000 $

- MICHAËL NGUYEN

Un homme qui s’était sorti d’une accusation criminelle de violence conjugale en raison des interminab­les délais n’en a pas fini avec la justice, puisque son ex-conjointe vient d’intenter une poursuite civile de 375 000 $ pour les 13 ans d’enfer qu’elle dit avoir subis. « Elle estime avoir été victime de violence psychologi­que, verbale et économique durant la relation. Elle allègue également que [l’ancien conjoint] a fait preuve de violence judiciaire en la poursuivan­t en diffamatio­n afin de la faire taire et de l’intimider », peut-on lire dans la poursuite civile récemment déposée au palais de justice de Montréal.

L’affaire avait pourtant commencé au criminel, au printemps 2021, quand un ingénieur de Repentigny, dans Lanaudière, avait été accusé de voies de fait envers sa conjointe.

Même si le dossier avait été confié dans les mains du tribunal spécialisé, ça n’avait pas empêché les choses de traîner, au point que les délais maximums imposés par la Cour suprême avaient été dépassés.

« Nous sommes asservis à une situation aussi frustrante qu’incontrôla­ble », avait dit la juge Joëlle Roy en affirmant n’avoir pas d’autre choix que d’ordonner l’arrêt des procédures.

STRESS POST-TRAUMATIQU­E

La victime, que Le Journal a choisi de ne pas nommer en raison des allégation­s de violence sexuelle, est alors tombée en stress post-traumatiqu­e.

« [L’arrêt des procédures] a dévasté la demanderes­se et sa condition s’est beaucoup détériorée », peut-on lire dans la poursuite civile.

Et comme si ce n’était pas assez, l’homme avait en plus intenté une poursuite civile en diffamatio­n, « pour qu’elle ne dénonce pas tout ce qu’elle a vécu durant la relation », selon la femme.

VIOLENCE

Sauf que cette fois, c’est la plaignante qui a pris les devants, en poursuivan­t à son tour son ex-conjoint et en détaillant les sévices qu’elle aurait subis.

Elle donne ainsi en exemple une fois où il l’aurait prise à la gorge, ou encore lorsqu’il l’aurait plaquée contre un mur parce qu’elle aurait accroché de la peinture fraîche.

À cela s’ajoutent des coups de poing et des menaces, peut-on lire dans le document de cour qui détaille aussi plusieurs agressions sexuelles alléguées, par exemple pendant que la victime dormait, ou encore une fois alors qu’elle venait d’être hospitalis­ée.

NOUVEAU PHÉNOMÈNE

La femme réclame une compensati­on pour « atteinte intentionn­elle aux droits fondamenta­ux garantis par la Charte des droits et libertés de la personne ».

« [Les poursuites civiles pour violence conjugale] sont un phénomène quand même nouveau, mais on en voit de plus en plus dans les dernières années », a commenté Me Karina Cloutier, du service Rebâtir de la Commission des services juridiques, qui pilote le dossier.

À moins d’un règlement à l’amiable, l’affaire sera prochainem­ent présentée à un juge. La femme est représenté­e par l’aide juridique.

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