Une famille a pensé déménager à cause du manque d’ambulances
Une jeune fille victime de graves crises d’épilepsie a dû attendre les secours pendant près de 20 minutes
Une famille de Val-des-Monts a pensé quitter la ville tellement les ambulanciers mettent un temps fou à arriver lors des graves crises d’épilepsie de sa fille.
« L’attente, c’est pratiquement insupportable. Comme parent, voir son enfant convulser et être impuissant, c’est très difficile », raconte avec émotion Pascal Thibault, qui habite Val-des-Monts depuis 2013.
Cette ville de l’Outaouais a le pire temps d’attente, selon une compilation de notre Bureau d’enquête, qui a analysé, sur une période d’un an, les délais entre un appel urgent au 911 et l’arrivée des ambulanciers pour les 112 municipalités de plus de 10 000 habitants du Québec (voir autre texte).
Les Thibault en savent quelque chose. Entre 2016 et 2020, l’état de leur fille épileptique a nécessité à huit reprises un appel au 911.
Il fallait alors qu’elle soit transportée d’urgence à l’hôpital, sans quoi sa crise ne prenait pas fin.
À six occasions, il a été jugé par les répartiteurs d’urgence que la vie de la petite Abigaëlle était en danger et qu’il fallait intervenir rapidement.
« On peut finir par en mourir en ayant un apport insuffisant en oxygène, par exemple. C’est une situation d’urgence », insiste le père de famille.
JUSQU’À 20 MINUTES
Malgré la haute priorité de l’appel, l’ambulance a parfois pris jusqu’à 20 minutes avant d’arriver au chevet d’Abigaëlle, confirment des données fournies par son établissement de santé. En moyenne, la fillette a attendu l’ambulance durant 17 minutes et demie.
Pourtant, le schéma de couverture ambulancière du ministère de la Santé juge que le domicile des Thibault devrait être desservi par les ambulanciers en huit minutes.
« Oui, les pompiers arrivent comme premiers répondants, mais ils ne peuvent rien faire », raconte Pascal Thibault.
À un certain point, la famille de deux enfants a même songé à quitter la ville dans l’espoir d’être mieux desservie.
« On a pensé assez sérieusement à déménager. Ça ne devrait pas être la solution de le faire », déplore M. Thibault, qui a finalement choisi de rester.
PONT HORS SERVICE
La situation est d’autant plus frustrante que la petite famille est établie à quelques centaines de mètres de Gatineau, qui a un délai d’intervention moyen deux fois plus court que celui de Val-des-Monts.
Mais un pont hors service depuis 2009 impose un détour de cinq minutes aux ambulanciers, confirme le CISSS de l’Outaouais, qui reconnaît que les délais à Val-des-Monts sont « trop longs » (voir autre texte).
Le Montvalois a fait des démarches auprès d’élus locaux pour que cet accès soit rétabli, mais en vain. « Je trouve qu’on n’est pas entendus. Les gens se relancent toujours la balle. C’est compliqué », déplore le père de famille.
« ÇA NE FAIT PAS DE SENS »
Heureusement, la petite Abigaëlle, qui a aujourd’hui 12 ans, a désormais accès à des médicaments à domicile pour calmer les crises. Un transport à l’hôpital n’est donc plus systématiquement requis.
Mais cela ne règle pas pour autant les délais ambulanciers de Val-des-Monts.
« Pour la sécurité de ma communauté, ça ne fait pas de sens. Je me soucie beaucoup des gens qui sont plus éloignés que moi dans Val-des-Monts. Ça doit être l’enfer d’y attendre l’ambulance », termine M. Thibault.