POUTINE PEUT ENCORE GAGNER LA GUERRE
La Russie possède quatre atouts majeurs… mais aussi des faiblesses
Il y a deux ans, presque tous croyaient que l’armée russe parviendrait rapidement à conquérir toute l’Ukraine. Vladimir Poutine lui-même prévoyait une opération de quelques jours.
Mais l’armée ukrainienne a repoussé l’armée russe d’une bonne partie de son territoire. Depuis près d’un an, les deux pays se font face sur les champs de bataille, sans que l’un puisse l’emporter significativement sur l’autre. Cette guerre peut encore révéler des surprises.
La guerre d’Ukraine se déroule sur trois fronts : celui des combats militaires proprement dits, celui de l’économie et celui de l’idéologie. wLa Russie n’a encore remporté de victoire complète sur aucun front. Cependant, ses progrès sont proportionnels à l’affaiblissement de l’engagement des États-Unis. La Russie peut encore gagner la guerre. Mais à long terme, elle sera expulsée de l’Ukraine.
LE FRONT MILITAIRE
L’armée russe dispose de quatre atouts majeurs :
■ Sa population est trois fois plus importante que celle de l’Ukraine.
■ La Chine et la Corée du Nord l’approvisionnent en équipements militaires.
■ Son vaste territoire est pour le moment en grande partie à l’abri d’attaques ukrainiennes.
■ Elle possède de l’armement atomique, quoique son utilisation dans le cadre strict de la guerre en Ukraine lui fasse probablement perdre l’appui de la Chine. L’armée russe présente plusieurs faiblesses. Elle est encore plus corrompue que l’armée ukrainienne. Elle a de la difficulté à s’adapter aux méthodes modernes de combat. Son moral est assez faible.
Les soldats ukrainiens ont la conviction profonde de se défendre contre un envahisseur. Les équipements militaires ukrainiens sont généralement plus performants que ceux de la Russie. Les Ukrainiens jouissent des conseils des armées de l’OTAN.
Malheureusement, l’armée ukrainienne se heurte à des difficultés importantes d’approvisionnement en munitions et en équipements, comme le montre son retrait d’Avdiïvka ces derniers jours.
Les hésitations des États-Unis à lui fournir une nouvelle aide financière en sont directement responsables.
L’armée ukrainienne parvient mal à recruter de nouveaux soldats. Ces difficultés s’accentueront si les États-Unis laissent tomber l’Ukraine. Un tel abandon abaisserait le moral des troupes ukrainiennes.
LE FRONT ÉCONOMIQUE
En raison de ses richesses en hydrocarbures et grâce au soutien de la Chine et de quelques autres pays, la Russie est parvenue à surmonter l’essentiel des sanctions économiques que les États-Unis et leurs alliés avaient décidé de lui imposer.
À l’évidence, l’économie russe ne s’est pas effondrée et elle ne montre
pas de signes d’un effondrement imminent. Cependant, la reconversion d’une part de son industrie dans le secteur militaire augure des jours sombres pour la population russe. C’est ici que le commerce avec la Chine est particulièrement important.
L’Ukraine ne dispose pas de ressources naturelles comme la Russie. Elle peut cependant compter sur l’aide économique des États-Unis et de leurs alliés. Face à leur potentiel économique, la Russie ne fait pas le poids.
Néanmoins, l’Ukraine entre en compétition avec plusieurs pays européens sur le marché céréalier. Malgré une aide de plus en plus importante des pays européens, ces derniers auraient du mal à compenser un éventuel retrait de l’aide américaine.
LE FRONT IDÉOLOGIQUE
Le front idéologique est celui où la Russie est la plus forte. C’est aussi le front où les Américains et leurs alliés ont le plus de difficultés à combattre.
Comme l’indiquait Liz Cheney récemment, la Russie a réussi à créer une aile pro-Poutine à l’intérieur du Parti républicain.
De même, une partie de l’opinion publique de plusieurs pays alliés à l’Ukraine retombe dans de vieux réflexes de soutien à Moscou qui rappellent l’ère soviétique.
La propagande russe est très présente dans les pays occidentaux en raison de l’ouverture de ceux-ci. Inversement, les arguments contre sa guerre en Ukraine sont censurés dans les médias russes.
La Russie diffuse aussi à travers le monde une forte propagande contre les autres pays occidentaux. Elle est soupçonnée de faire des pressions dans plusieurs pays pour en interdire l’accès aux médias occidentaux.
PEU DE CERTITUDES
Une chose paraît assez certaine : sans l’aide des États-Unis, l’Ukraine ne pourra pas tenir le coup devant l’armée russe.
Pourtant, à long terme, la Russie ne pourra pas non plus se maintenir en Ukraine. Elle en sera chassée comme elle a déjà été chassée d’Afghanistan, en dépit de ses politiques de russification.
Une autre chose paraît aussi assez certaine : si l’Ukraine tombe, Poutine ou les nationalistes russes poursuivront leurs politiques de conquête. Ils continueront à mépriser les autres Occidentaux. Ils utiliseront les ressources des territoires conquis pour renforcer l’armée russe.
Le monde qu’ils préparent est un monde de guerres dans tous les territoires européens ou d’influence européenne.