Le mot en R de la CAQ
La première chose à faire pour la CAQ serait de constater que son approche actuelle vis-à-vis d’Ottawa ne donne pas les fruits escomptés. Aucune pomme, aucune orange, aucune banane.
Le gouvernement Legault a beau dépêcher un quatuor de ministres importants et tenter de démontrer que les politiques désorganisées en immigration du gouvernement fédéral ont un coût et déstabilisent nos services publics. L’effet est nul.
Il a beau s’unir avec les autres provinces, comme ce fut le cas dans le dossier des transferts en santé. Effet nul.
Il a beau utiliser toutes les métaphores possibles et inimaginables
– « louisianisation », « survie de la nation », « point de rupture », « crise humanitaire ». Effet nul.
Il a beau avoir obtenu un mandat fort à la dernière élection. Effet nul.
Il a beau faire face à un gouvernement libéral minoritaire, impopulaire, et une représentation importante du Bloc Québécois. Effet nul.
Le gouvernement Trudeau est intransigeant. Pire : les demandes du gouvernement l’ennuient de plus en plus. On ne prête même plus l’oreille au récital de la CAQ.
CETTE IDÉE QUI RÔDE
Si le gouvernement Legault est moindrement sérieux, il est temps qu’il change de stratégie en immigration.
Sinon, il risque de s’enfoncer dans un fédéralisme de lamentations, de plus en plus humiliant.
Cela concerne nécessairement le proverbial rapport de force avec Ottawa.
En d’autres mots : comment le gouvernement Legault peut-il forcer la main d’Ottawa pour qu’il réponde à ses demandes – soit de compenser et obtenir les pleins pouvoirs en immigration ?
Québec solidaire propose de rouvrir l’entente Québec-Ottawa de 1991 sur l’immigration. C’est une possibilité pour la CAQ de grappiller des gains ici et là.
Il y a aussi la méthode Olivia Chow, mairesse de Toronto.
Pour faire face à l’afflux des demandeurs d’asile dans sa ville, elle a menacé de hausser les taxes de 6 % en soulignant les coupables – Justin Trudeau et Chrystia Freeland. Une pilule qui serait difficile à faire avaler.
Il y a une autre idée, qui rôde depuis un temps. Cette idée, c’est un référendum sectoriel pour rapatrier les pouvoirs en immigration du fédéral.
Des militants caquistes avaient proposé l’idée en 2022. Christine Fréchette, ministre de l’Immigration, ne l’avait pas exclu récemment.
Le PM, lui, a rejeté l’option. Pas nécessaire, selon lui.
Cela pourrait pourtant être une option pleine de sens pour la CAQ.
Les sondages indiquent que ce référendum serait largement gagnant. Le chef péquiste n’aurait pas d’autre choix que de l’appuyer, de jouer les seconds violons nationalistes derrière lui. Et qui, au Québec, oserait jouer au chef du camp du « non » ? Denis Coderre ?
Et Ottawa aurait l’obligation de négocier avec le Québec après un tel référendum. C’est prévu par un renvoi de la Cour suprême.
Voilà pour la CAQ une bonne façon de renouveler son discours autonomiste.
VOIES DE PASSAGE
François Legault a toujours écarté l’idée d’une « égalité ou indépendance » à la Daniel Johnson ou d’un « quoi qu’on dise, quoi qu’on fasse » à la Robert Bourassa pour que le Québec gagne un peu d’air dans le Canada.
C’est son choix. Or, il y a quand même des voies de passage s’il souhaite aller au-delà des slogans.
Mais peut-être le PM et son gouvernement ont-ils peur de récolter une tempête après avoir semé le vent.